La chambre des officiers

*

Dans son premier roman Marc Dugain, quarante et un ans, nous propose la déchirante histoire de son grand-père, “gueule cassée” de la Grande Guerre. Magnifiquement raconté, très touchant.

Dans les premiers jours de 14, Adrien F., lieutenant du génie, est fauché par un éclat d’obus sur les bords de la Meuse. Défiguré, il est transporté au Val-de-Grâce où il séjournera cinq ans dans la chambre des officiers. Au fil des amitiés qui s’y noueront, lui et ses camarades, malgré la privation brutale d’une part de leur identité, révéleront toute leur humanité.
De cette épopée dramatique, émouvante, mais drôle aussi parfois, on retiendra que des blessures naît aussi la grâce.

“Ma greffe osseuse ne prends pas. Le chirurgien m’assure qu’il n’a pas dit son dernier mot. Je ne suis pas près d’en prononcer un. L’infirmière qui a reconduit Weil passe près de mon lit. Je l’arrête et lui montre mon ardoise. Elle patiente pendant que j’écris:
- Voulez-vous voir quelque chose que vous ne verrez chez aucun autre homme?
Comme de l’autre main je tiens mon drap très serré à la taille, je vois la couleur pourpre lui monter au visage. Puis je la fixe droit dans les yeux.
Et je lui tire la langue par le nez. Même Penanster en sourit de son seul oeil valide. La petite infirmière détale.
Pour la première fois, j’ai fait le tour de l’étage par le couloir circulaire. Je suis parti seul, j’ai croisé quelques regards familiers, habitués, d’infirmières. D’autres n’ont pas pu soutenir de croiser le mien.”

*

1