Prévert est près des gens. Il utilise la langue populaire de sorte qu’il réussit à rejoindre un large auditoire. La façon dont Prévert combine et accommode les mots du quotidien leur donne une vitalité et une force accrue.
Thèmes abordés :
La difficulté d’être dans un univers absurde où l’homme considère sa vie comme un état temporaire avec comme perspective finale la mort.
Le monde de Prévert est tout en antithèse et ne laisse pas de place à la nuance et à la subtilité. Les thèmes abordés sont sensiblement les mêmes. Malgré la variété des sujets qui s’offrent à lui, il traite et fait revenir dans ses poèmes les mêmes thèmes. La manière qu’il aborde ces thèmes crée un renouvellement sans cesse de l’intérêt chez le lecteur.
Le langage est à la fois, important comme moyen de communication entre les hommes, mais aussi comme outil pour le poète. Prévert n’utilise pas un langage poétique mais se sert du parler populaire auquel il attribue une valeur poétique. Pour cela, il l’accommode à sa manière et lui communique un renouveau de jeunesse et de vigueur en changeant le sens des mots en les disposant selon sa fantaisie. Il transforme ainsi le langage en poésie. L’intérêt pour la poésie de Prévert ne réside pas tant dans son contenu mais dans l’originalité de son expression.
Afin de conserver une allure naturelle à la langue populaire devenue alors poétique, le poète accumule les répétitions qui donnent à l’expression la démarche hésitante et désordonnée de l’improvisation. L’absence de ponctuation accentue à cette impression. Par l’absence de ponctuation, le lecteur est appelé à réagir de façon personnelle : accélérer, ralentir ou faire des pauses selon son désir.
L’importance accordée au style oral est un des traits qui caractérise Prévert. C’est par l’émotion véhiculée dans le message du poème que le lecteur retrouve l’émotion souhaitée. En effet, lorsqu’il est ironique, indigné, méprisant, tendre, brutal, écoeuré ou exaspéré, ces registres variés ainsi que leur degré d’intensité jouent un rôle tout aussi important que celui des mots.
Prévert a le don de la sympathie. Il sait comment toucher les gens parce que sa sensibilité est la même que celle du lecteur. Il utilise aussi les images comme la pluie et le beau temps qui constituent l’essentiel des conversations parées de platitudes ! L’expression de Prévert est anticonformiste. Il se manifeste sous forme d’opposition et de refus et s’exprime de façons variées. De plus, le poète fait des pirouettes ! Ces changements de direction ont souvent pour origine des associations déclenchées par une image, un mot ou un son. Leur caractère imprévu donne l’impression que Prévert saute d’une idée à l’autre.
L’humour est également un procédé courtisé par l’auteur. Il prend des formes différentes allant du charmant au noir. Quel que soit son aspect, il demeure spontané. Plus souvent, Prévert a recours à l’humour noir, une forme qui correspond à sa nature et qui présente un double avantage. Premièrement, dire une chose sur le ton qui convient le moins au sujet lui est une source de joie. Il peut, par la suite, obtenir des effets humoristiques abondants et naturels. Son humour touche uniquement les mots. Cette façon de faire lui est particulière car lorsqu’il traite de sujets sérieux et qui lui tiennent à cœur, il agrémente constamment ses textes d’effets humoristiques qui forment un contraste surprenant avec l’esprit du passage. Le sérieux se retrouve dans la pensée plutôt que dans la forme.
L’ambiguïté est également une forme d’humour à laquelle Prévert a parfois recours. Par son aspect équivoque, elle lui offre une possibilité supplémentaire de jeu, mais un jeu sérieux cette fois, qui consiste à traiter certains poèmes de façon que le lecteur puisse tirer des interprétations différentes selon l’angle sous lequel il les aborde. Prévert laisse au lecteur le soin de tirer ses propres conclusions. L’humour offre également au poète l’occasion de masquer ses sentiments lorsqu’il n’a pas envie de les laisser voir.
Le cinéma figure au premier rang
des activités qui ont joué un rôle important dans l’esthétique
poétique de Prévert. Par exemple, l’image est le moyen d’expression
des poètes mais, pour Prévert, c’est la forme idéale,
celle qui vient le plus naturellement sous sa plume. Il passe constamment
de la subjectivité à l’objectivité, en ce sens qu’il
transpose ses émotions et ses rêves sous une forme concrète,
des images.
Dans le monde poétique de Jacques Prévert, réalité, rêve et irréalité coexistent harmonieusement. Cette évolution fait que tout est possible si bien que, dans certains poèmes, les personnages se trouvent engagés dans des aventures où animaux, plantes, objets parlent, se métamorphosent, participent à la vie.
Le langage représente pour Prévert
un champ d’action aux possibilités innombrables car le laisser-aller
du parlé lui permet de satisfaire à la fois son goût
du jeu et son plaisir de la création formelle, une situation incomparable
pour un auteur qui accorde autant d’importance à ce qu’il dit qu’à
la façon dont il le dit. Prévert utilise toutes les ressources
possibles du langage pour servir ce dessein et ne recule devant aucun moyen
pour y parvenir. Si bien que dans sa poésie on retrouve de tout.
Verve, invention verbale, formules heureuses et marquantes, notations subtiles,
images inoubliables, etc.
Jouer avec le langage est un plaisir auquel Prévert ne peur résister. Et cela même au stade le plus simple, celui des mots, puisque le seul fait de les prononcer, de les répéter constitue une joie en soi. Pour Prévert, les mots ont un pouvoir qui va au-delà de leur sens. De plus, il tire parti de similitudes de sons et de sens pour créer des effets stylistiques comiques et inattendus.
Il crée parfois de nouveaux mots. Non pas pour palier à une insuffisance du langage qu’il juge trop pauvre mais pour satisfaire son goût du jeu et lui donner à nouveau l’occasion d’exprimer son anticonformisme. Prévert utilise des mots qu’il a créé à partir de leurs contraires.
Par son talent et son savoir-faire, Prévert transforme le langage de tous les jours en poésie. Il est influencé également par les slogans publicitaires, les coutumes, les expressions toutes faites et les lieux communs.
Prévert utilise avec brio les assonances. Il les utilise rarement seules et préfère les incorporer à d’autres procédés. Il fait jouer un rôle analogue aux allitérations, source amusantes de rythmes imprévus. La répétition occupe également une place importante en ce sens qu’elle donne, elle aussi, des rythmes en même temps qu’une certaine musicalité à un texte. Prévert ne limite pas la répétition aux mots et aux formules, il l’étend également aux structures. De tout les procédés employés par Prévert, l’énumération est certainement celui où il atteint sa plus grande réussite. L’inventaire est sa technique la plus typique, celle où l’originalité de son expression se manifeste le plus brillamment, ce qui est assez proche du cinéma. Chaque mot correspond à un objet, chaque objet à une image et leur déroulement successif donne une impression de mouvement qui est le principe même du cinéma. Le lecteur est toujours laissé à lui-même pour tirer ses propres conclusions et décoder l’image illustrée. Il brise des associations stéréotypées, utilise l’écriture automatique, qui est une forme d’expression spontanée et intacte de l’imagination. Il ajoute également des calembours et des allitérations aux proverbes et dictons populaires. Généralement, Prévert n’utilise pratiquement pas de ponctuation. S’il l’utilise, il l’emploie de façon spéciale et qui n’a rien à voir avec l’usage que l’on fait normalement.
Prévert chante la vie, ses beautés et ses joies.
Prévert dénonce l’hypocrisie et la malfaisance.
Une partie de l’œuvre de Prévert a été traduite en quelques 15 langues. Les oeuvres sont choisies car la traduction peut faire trahir l’auteur. Selon la langue, certains concepts pourraient perdre leur sens dû à une traduction impossible ( Jeux de mots, allitérations, etc. ) Les poèmes qui s’accommodent le mieux de la traduction sont ceux où Prévert raconte une histoire tout uniment et où la simplicité de la forme permet une de présenter une valeur égale à l’original.
Exemples de procédés stylistiques utilisés par Prévert:
" l’Afrance et la Lemagne "
- Cagnes-sur-mer
" Les écrits s’envolent les paroles restent "
- Drôle d’immobile
" il y en a qui élève les enfants
d’autres qui élèvent des poulets
ou des vaches
Moi j’élève la voix
et il recommence à gueuler "
- Drôle d’immeuble
" Nous mangions notre linge sale en famine "
- À quoi rêvais-tu ?
" Concomitamment la muture concraite
et la peinsique
abstraite. "
- De vos jours
* Ces extraits sont tirés du recueil La pluie et le beau temps