Lamentation aux Couleurs
Poème Apocryphe
Noir est le coeur de la terre
Dans la plaine meurtrie par les sabots
Qui expire sous nos corps sans vie
Vert est l'océan qui pleure ses fils
Roulés dans ses vagues écumeuses
Bercés jusqu'au rivage pour y mourir
Rouge est le sang qui a abreuvé les rochers
Lorsque les haches danéennes sont tombées
Sur ceux qui faisaient chanter Bara
Gris est le visage de mes compagnons
Terrassés dans la boue
Par les flèches et les épieux
Blanc est ce ciel qui n'est plus
Où le soleil et la lune sont arrêtés
Pour gémir des larmes d'argent
Verte est la forêt protectrice
Où nos jambes n'ont pu nous porter
Brisées par l'airain que nous avons nous-même forgé
Rouges sont les ailes du corbeau qui festoye
Toute la nuit il s'est gavé
Des yeux de ceux qui ne verront plus
Noir est le visage de mon aimée
Et ses mains sont pleines de cendres
Au lait et aux larmes mélangées
Blancs sont les cheveux qu'elle a coupé
Et qu'au feu elle immolle
Pour ne jamais m'oublier.
Gris est mon regard vide
Accroché sur les nuées de nos pères
Oublieux de mes blessures amères
Sous la montagne les couleurs s'en sont allées
Menées par la Dame qui les avait créées
Avant que le sommeil efface le monde
Pour que revienne le jaune.
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