La Prophétie
 
   Le concept de la prophétie en Islam est - comme celui de la déité - quitte des défectuosités entachant les plus anciennes religions païennes et célestes. Il est affranchi des confusions avec la sorcellerie et la divination, tout comme des suggestions imaginaires et des actes de folie que l'on appelait jadis "la sacrée folie", les délires étant dans ce cas expliqués par l'intervention des esprits suprêmes obsédants. La prophétie en Islam a cru sur une formidable terre solide dont les prétentions surnaturelles et métaphysiques sont extirpées. Et là, c'est le plus voyant signe d'un vrai prophète.

  

   Un concept aussi purifié de cette mission n'est pas un constat incident, produit en fouillant les détails du dogme, mais une prescription solennelle à tout musulman, diffusée dans le Livre sacré de l'Islam et incorporée à la foi en le Message de son Prophète.

 

    La prophétie n'est donc ni le statut d'un sorcier, ni celui d'un devin ou d'un fou :

"Et pas un Messager ne leur est venu sans qu'ils s'en soient moqués.
C'est ainsi que Nous faisons pénétrer (la mécréance) dans les cœurs des coupables.

Ils ne croiront pas en lui (le Messager ou le Coran) bien que se soit accompli le sort traditionnel des anciens.

Et même si Nous ouvrions pour eux une porte du ciel, et qu'ils pussent y monter.
ils diraient: "Vraiment nos yeux sont voilés. Mais plutôt, nous sommes des gens ensorcelés"."

(Sourate 15 - versets de 11 à 15)
Le surnaturel ne sera alors d'aucun profit dans la conviction d'un buté arrogant. Celui-ci ne tardera pas à le prétendre de la magie ou de l'ivresse, même si le prophète lui ouvre une voie d'accès vers le ciel.

   Pourtant, le surnaturel fut disponible au Prophète de l'Islam... Les gens le lui avaient attribué alors qu'il s'y refusa, refusant même que ceux-ci se laissent méprendre. S'il n'avait pas réagi à leurs spéculations, les gens auraient fait d'une simple coïncidence un miracle que nul autre prophète ait jamais apporté : le soleil s'éclipsa au jour de la mort de son fils Ibrâhîm, au moment même de l'enterrement. Là, les musulmans s'écrièrent autour de la tombe : "Il est certes l'un des signes d'Allah que le soleil s'éclipse pour la mort du fils de Muhammad, que la paix soit sur lui !"

   Une éclipse s'est justement produite ce jour-là, selon les astronomes au temps moderne. A un "prophète" prenant en chasse les incidents extraordinaires ou rejetant - par impuissance - le surnaturel, que coûterait un simple mutisme ?! Mais le Prophète Muhammad, n'oubliant point dans son affliction sa mission de guide aux Croyants, ne tarde pas à riposter, exhortant son entourage traumatisé : "Le soleil et la lune ne sont que deux signes à Lui ; ils ne s'éclipsent pour la vie, ni pour la mort de quelqu'un..."

   D'ailleurs, à notre avis, la prophétie ne saurait recevoir plus d'honneur que d'être à maintes reprises considérée dans le Coran comme une guidée céleste à destination des consciences et des esprits, inconditionnée par les présages et prétentions surnaturelles.

 

"Et ils disent : "Que ne fait-on descendre sur lui (Mouhammad) un miracle de son Seigneur?" Alors, dis: "L'inconnaissable relève seulement d'Allah. Attendez donc ; je serai avec vous parmi ceux qui attendent."
(Sourate 10 - verset 20)

 

"Dis: "Je ne détiens pour moi-même ni profit ni dommage, sauf ce qu'Allah veut. Et si je connaissais l'Inconnaissable, j'aurais eu des biens en abondance et aucun mal ne m'aurait touché. Je ne suis, pour les gens qui croient, qu'un avertisseur et un annonciateur"."
(Sourate 7 - verset 188)

 

"Dis-(leur): "Je ne vous dis pas que je détiens les trésors d'Allah, ni que je connais l'Inconnaissable, et je ne vous dis pas que je suis un ange. Je ne fais que suivre ce qui m'est révélé." Dis: "Est-ce que sont égaux l'aveugle et celui qui voit? Ne réfléchissez-vous donc pas?""
(Sourate 6 - verset 50)

 

"C'est Lui qui détient les clefs de l'Inconnaissable..."
(Sourate 6 - verset 59)

   Par cette idée rationnelle de la prophétie, l'Islam exacerbe la distinction entre deux modèles opposés dans l'histoire des religions : l'un enfoncé dans le passé ; il naquit dans le berceau des prophéties païennes où le culte était confondu avec la magie et la divination, puis avança clopin-clopant dans un sens où la perte et la prise de conscience, la superstition et l'inspiration juste et sincère s'entrelaçaient. L'autre enfoncé dans le futur ; il fut inauguré par le dernier des prophètes. Celui-ci frappa d'interdiction sorcellerie et divination et de discrédit folie sacrée, pour entraîner l'homme à discerner la bonne voie et à la choisir. Entraînement - non pas enchantement par les merveilles du prodige et le charme du mystère - à l'esprit humain afin qu'il sache comment regarder et réfléchir... Celui qui voit n'est pas égal à l'aveugle.

    La dernière prophétie : il va de soi, la flagrante différence entre les deux modèles avancés étant mise attentivement sous examen. D'ores et déjà, la porte des réformes est ouverte à toute personne compétente, qui ne doit forcément pas être un superman ni un enchanteur pouvant dévoiler l'inconnaissable.

   Une recherche comparant la prophétie en Islam à aucune autre sera loin d'être honnête si elle prétend la première une version apocryphe ou une copie de la deuxième. En effet, la dissimulitude entre une prophétie s'attribuant comme atout l'éclaircissement d'esprit et de conscience et des prophéties s'attribuant comme atout les prodiges et miracles s'étale au grand jour de manière incontestable. Il va sans dire que la première appelle au Seigneur de l'Univers tandis que la deuxième, au dieu d'une race ou d'une tribu... Aux yeux d'un chercheur, lorsque sont égaux "plus" et "moins", "noir" et "blanc", la mesure selon laquelle la recherche est effectuée doit être erronée. Mais lorsque le "moins" excède le "plus", et que le "noir" devient plus clair que le "blanc", on aura affaire à un esprit de recherche expressément falsificateur ou obstiné, refusant tout simplement d'ouvrir les yeux.

   En effet, la prophétie islamique est venue corriger et parachever les conceptions antérieures de prophétie ; justement ce qu'est venu faire la conception islamique de Dieu à l'intention des précédentes conceptions humaines.

 

- Passage extrait des "Vérités de l'Islam et Erreurs de ses Ennemis", ouvrage de Mr. `Abbâs Mahmûd Al-`Aqqâd.
 

 

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