Est-il possible d'orienter l'éducation d'un jeune enfant pour l'aider à échapper à dukkha tout au long de sa vie ?voir le texte complet de la question
Réponse :Texte complet de la questionIl me semble que la question que vous posez devrait peut-être reformulée. Dukkha existe (c'est la première noble vérité), dukkha cesse quand l'attachement cesse (c'est la troisième noble vérité). La voie (la quatrième noble vérité) ne consiste pas tant à "échapper" (une fois de plus on retrouve cette terminologie, d'échappement, de soustraction) à dukkha, mais de faire en sorte que dukkha ne trouve plus les moyens de s'exercer sur le sujet. Il est question que le sujet ne coopère plus avec dukkha pour que celle-ci se répande, se développe, se répète et s'installe. Si le sujet ne lui prête plus main forte, dukkha n'a plus de terrain où se réaliser.
Si je reviens à cette introduction, c'est parce que je voulais commencer par vous dire qu'il n'est pas question d'échapper à dukkha aussi longtemps que le sujet tel qu'il est habituellement défini dans les sociétés occidentales existe. Pour continuer dans cette idée (même si j'ai bien compris que vous vouliez dire "ne pas prêter main forte à dukkha") il apparaît impossible à un jeune enfant d'échapper à dukkha. Ce très jeune enfant dont vous parlez est d'emblée plongé dans dukkha, en quittant le ventre de sa mère, en ressentant l'acidité de son estomac qui le pousse à réclamer sa nourriture, en étant séparé de sa mère, en étant sevré Durant toute cette période ces occasions de dukkha sont innombrables. Il n'est pas possible de l'y soustraire. C'est d'ailleurs pour cela que l'enfant a besoin d'être entouré, soutenu et guidé dans une démarche de temporisation et normalisation de ces événements. Dans la phase infantile, l'attachement n'est pas toujours aussi clairement identifiable de dukkha que dukkha primaire. En outre, l'attachement ne doit pas forcément être mise en cause, car la construction d'une individualité, d'une identité requièrent l'appropriation, l'agrégation, l'association et l'attachement. Ce n'est qu'une fois que ces phases sont dépassées que l'on peut envisager de mettre en cause l'attachement, de la même manière que l'on enlève les tuteurs aux arbres une fois ceux-ci développés. Par exemple, en Thaïlande, c'est vers 18 20 ans que les jeunes hommes quittent leur famille pour se retirer durant quelques mois dans un temple bouddhique. A ce sujet, j'ai souvent trouvé que la démarche bouddhique posait des problématiques comparables à celles dont on parle en Europe comme étant la crise de l'adolescence où une fois acquis la maîtrise de l'appareil percepto-sensoriel et la personnalité, l'adolescent en perçoit intuitivement l'incommensurable vacuité et les limites.
Je ne dirai pas que le bouddhisme est une philosophie pour adultes, même si je pense qu'une certaine maturité soit nécessaire, mais ne dit-on pas par ailleurs que la maturité n'attend pas le nombre des années ? Ne vous souvenez-vous pas du propre cheminement du bouddha historique ? N'avez-vous jamais lu ce récit romanesque écrit par Herman Hesse " Siddharta " ? N'avez-vous pas lu l'histoire de ce jeune homme rencontré par le bouddha dans un hangar à poteries (Cf. le Pukkusati Sutta) ? N'avez-vous pas lu l'histoire de l'étang de lotus ( Cf. le Mahavagga Sutta) ?
Croyez-vous que dès le "départ" il est possible d'orienter l'éducation d'un très jeune enfant pour l'aider à échapper au dukkha tout au long de sa vie future? Je n'ai jamais rencontré d'idées sur ce point dans la littérature bouddhiste (probablement parce que la préoccupation pour l'enfance est très récente dans la civilisation humaine, les écoles de pensée anciennes ne s'y sont que peu intéressé, et aussi parce que le bouddhisme est une recherche pour adultes, pour gens mûrs qui ont d'abord à en resentir le besoin).
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