Un «bon» Dieu très sollicité

(Réflexion libre et à voix haute sur la plus grande vedette internationale de l’heure)

Au début du monde, lorsque le bon Dieu a décidé de créer l’homme «à son image», prévoyait-il qu’il serait imploré, prié, supplié, invoqué à n’en plus finir, dans l’avenir? Lui qui possède l’omniscience, le don d’ubiquité, qui voit tout, entend tout, sait tout, aurait-il eu des «ratés» dans la vision du futur de «sa» créature, au point qu’il ne peut plus faire «marche arrière» en cet An 2000, alors que son nom est galvaudé pour un tas de raisons qui n’ont plus rien à voir avec sa nature même, son essence «divine», sa raison d’exister, telles que le conçoivent ses «enfants» depuis leur naissance sur cette terre?

Oh, certes, aux premiers jours de la Création, sa tâche était facile: il n’avait qu’Adam et Ève, dans leur beau paradis terrestre réservé à eux seuls, à bien élever, à écouter leurs demandes ou requêtes, et à satisfaire leurs moindres désirs. Les animaux, eux, n’avaient pas eu droit aux privilèges conférés à l’homme seulement (je dis bien à l’«homme»... seulement, car la femme, elle, est venue après, suite à une histoire de côte prélevée, et semblait ne faire que de la figuration dans le plan du bon Dieu, jusqu’à ce qu’elle mette le bordel dans un paradis si bien aménagé...).

Puis, après avoir été expropriés manu militari de leur «home, sweet home», par un Ange du Ciel armé de son glaive (lui, il aura des descendants, terrestres ceux là, et qui ne s’identifieront pas au ciel, loin de là!), Adam et Ève, n’ayant personne d’autre à qui se plaindre de cet acte discriminatoire (la Régie des loyers et la Charte des Droits de l’Homme n’existant pas à ce moment-là), après avoir cru (en Dieu), ont crû et se sont multipliés, probablement entre frères et sœurs dans les premiers temps (l’inceste n’étant pas encore affaire sociale ou cas de Justice pour le bon Dieu), peuplant la Terre de tribus, de races (les Anciens ne connaissaient pas alors le politicard correct, qui nous incite aujourd’hui à dire communautés multiculturelles ou pluriethniques) et de sociétés toutes différentes les unes des autres.

Mais, malgré la punition du bon Dieu, les descendants d’Adam (et d’Ève, qui a quand même son mot à dire dans cette lignée), en «enfants de Dieu» aimants, fidèles et dévoués -- comme tout bon enfant se doit de l’être envers un parent monoparental, fut-il bon Dieu --, qui ont retenu la leçon, ont continué à implorer le bon Père céleste dans leurs moindres actions, pensées, faits et gestes. Et la famille originelle du bon Dieu est devenue au cours des âges une «famille élargie», où tous les enfants ont maintenant leur mot à dire au sujet du père, de ses décisions, des projets envers ses enfants, etc.

Du coup, le bon Dieu en a certai-nement attrapé un mal de tête carabiné, ces derniers millénaires, ne sachant plus où donner de la tête pour satisfaire les moindres invocations de sa famille aux comportements religieux «dysfonctionnels», tellement sa famille est nombreuse, polyvalente, dispersée, de caractères et de tempéraments différents et, surtout, dont les membres qualifient tous leur Père céleste de noms différents, de qualités diverses, d’intentions particulières, ou lui attribuant des tendances sociales, politiques ou philosophiques variées, à l’image de ses nombreux enfants dispersés. Comme conflit de générations, on ne fait pas mieux!

En l’An 2000, il doit être encore plus déchiré dans son désir de faire plaisir aux uns et aux autres, alors qu’une partie de sa famille, fidèle à son éducation parentale, célèbre le deux millième anniversaire de naissance de son fils chéri, le petit Jésus, au détriment de tous ses autres «fils» et «filles» de sa nombreuse progéniture. Au nom du père et du fils, ses enfants n’en finissent plus de l’implorer de-ci de-là pour qu’il accède à leurs moindres désirs, aide leurs moindres actions, résolve leurs moindres problèmes, satisfasse leur moindre caprice.

Ainsi, dans le monde occidental, depuis l’avènement des sports de spectacle et des jeux olympiques modernes, les membres des équipes de toutes disciplines ne ces-sent de lui demander la grâce de faire gagner leur équipe. On lui demande à hue et à dia de favoriser telle équipe de football, de soccer, de baseball, de basketball, de hockey, de tennis, de pétanque, de rugby, et tant d’autres sports populaires, et les signes de croix et les suppliques n’en finissent plus d’être utilisés pour amener la protection divine sur les uns au détriment des autres. Les vainqueurs le remercient ensuite publiquement de leur performance, et les perdants se risquent à dire que, ce jour-là, le bon Dieu n’a pas entendu leurs prières et qu’il n’a pas favorisé leur équipe parce qu’ils ne l’ont pas prié assez fort, ou parce qu’ils ont manqué à un devoir religieux, ou parce qu’un membre de l’équipe avait proba-blement oublié, lui, de l’implorer, ou avait une faute sur la conscience. Bref, Dieu est le responsable de la victoire ou de la défaite, c’est selon, et comme tout bon partisan, il a donné un petit coup de pouce à son équipe favorite.

Pour imiter ces figures prestigieuses, les hommes politiques font de même, surtout en périodes de campagne électorale. Dieu est invoqué par ci, par là, par la gauche, par la droite, par le centre, par les modérés, par les libéraux, par les conservateurs, par les intégristes, par les indépendants, bref, de tous bords et de tous côtés. Dieu n’a pas de préférence politique personnelle, mais les politiciens et leurs supporteurs se font un devoir d’informer la population de la préférence du bon Dieu pour leur parti politique. Certains ont même reçu personnellement de Dieu ce témoignage et se portent garants de la véracité de ce message.

Dieu fait ainsi partie des discours électoraux, au même titre que la famille, le commerce, la politique, la défense nationale, les services sociaux, le loisir, le sport... C’est tout juste s’il n’approuve pas personnellement les collectes de fonds qui sont faites pour le parti, et encore! Bref, ici encore, il est continuellement invoqué ou sollicité pour apporter la victoire ou renforcer la position du parti politique qui lui fait la plus grande place dans son programme électoral. Et quand c’est chose faite, c’est du pareil au même: les vainqueurs avaient Dieu de leur bord, les perdants... se perdent en conjectures devant le fait que Dieu les a abandonnés ou laissé tomber. Mais il s’en tire très bien, quels que soient les résultats des élections. Aux États-Unis, il a droit de mention «dans» la devise -- «In God We Trust» -- et «sur» la devise de ce pays, le plus puissant au monde. Belle compensation, quand même, pour quelqu’un qui a oublié de favoriser une partie de l’électorat.

Pour ne pas être en reste, les gens du spectacle, surtout encore dans ce vaste pays, s’arrogent le droit de le mentionner comme inspirateur et responsable de toute forme de succès dans leur art, en particulier dans le domaine du cinéma et du show-business. Comme, il y a belle lurette, Dieu s’est lui-même donné en spectacle dans un paradis digne de la conception hollywoodienne, puis durant 40 ans au cours du long périple dans le désert de son peuple choisi (tiens, tiens, aurions-nous ici un cas flagrant de favoritisme parental, ce qui est indigne d’un vrai bon père qui prend soin de tous les membres de sa famille...), et par la suite à différentes époques et en différents lieux et places, il est normal qu’aujourd’hui il ait sa place et soit mentionné durant le plus gros show télévisé de ce pays, soit la traditionnelle remise des Oscars cinéma-tographiques.

Ainsi, après les remerciements des vedettes «oscarisées» à leur producteur, leur réalisateur, leur gérant, leur maquilleuse, leur habilleuse, leur coiffeuse, leur papa, leur maman, leurs enfants, leur chien et leur chat puis leur public, Dieu a enfin sa mention dans les témoignages touchants et attendrissants de ces vedettes. Il est étonnant, d’ailleurs, qu’il vienne en dernier de liste en tant que «personne» ayant aidé la carrière de ces professionnels du show business, alors que tous les autres, en politique, en sport, en art militaire, le considèrent comme le principal responsable de leurs succès. Mais, ici encore, ce Père céleste a une bonne compensation: son digne fils, «Jésus Christ», n’a-t-il pas été élevé au rang de «superstar», par ces mêmes artistes qui rendent hommage au père sur la plus grande scène de spectacle au monde?

Et puis, pour ce qui est du commun des mortels, ces derniers savent également lui donner crédit pour les faveurs qu’ils obtiennent, surtout lors d’événements dramatiques. Les rescapés d’accidents d’avions, de naufrages, de catastrophes naturelles, de conflits armés, d’accidents causés par l’homme, tous le remercient de les avoir épargnés dans ces moments graves. Eux s’en sont réchappés, mais tant pis pour les victimes: le bon Dieu ne pensait pas à eux à cet instant fatidique, ou ignorait leur supplique pour des raisons que seul un père connaît, ou dont l’imploration n’était pas assez fervente ou intense à ce même instant. Comme tout bon père, le bon Dieu ne fait pas de favoritisme envers ses enfants, mais il en privilégie quand même certains pour des raisons obscures que même un bon psychologue ne peut expliquer...

N’oublions pas les pèlerins qui, eux aussi, et de façon différente ou pour des raisons nettement moins terre-à-terre, bénéficient des grâces et des faveurs du «père céleste», que ne cessent de leur prodiguer les représentants de ce père sur terre, et surtout le chef de la «famille» terrestre des croyants qui, lui, est appelé «bon saint-père», pour faire la distinction entre les deux pères (À l’époque des familles multi-parentales, cela ne détonne plus dans la société, contrairement au passé...). Ce dernier, et les représentants du père céleste, dans les églises, offrent avec largesse les faveurs dispensées par lui à ses enfants de la terre: bénédictions par ci, indulgences par là, prières avec intentions spéciales, et, comme tout le monde ne peut pas être rejoint partout, d’autres bénédictions urbi et orbi lors de grandes manifestations publiques. Comme ça, tout le monde est content, et peut s’émouvoir d’avoir reçu la bénédiction du bon saint-père par téléviseur interposé.

Les pèlerins en profitent pour accentuer leurs propres prières, leurs demandes, leurs remerciements, en espérant qu’un miracle vienne couronner le tout, preuve de l’existence du père céleste et des marques d’affection qu’il prodigue à ceux qu’il chérit bien. Ce bon Dieu ne sait plus où donner de la tête tellement ces demandes sont nombreuses, diverses et faites en plusieurs langues. Il n’y a pas si longtemps, pour-tant, il avait puni ces mêmes «enfants terribles» par la confusion des langues, due au péché d’orgueil de leur part. Mais, aujourd’hui, il se met au diapason: il devient polyvalent en matière de compréhension des langues et se met à la mondialisation, pour participer au «marché commun des religions». Il se fait entendre et comprendre partout dans le monde, et ne tient pas compte des noms différents que ses enfants lui donnent pour le prier, l’invoquer, le mêler aux affaires humaines, etc. Et les pèlerins qui repartent bredouilles pourront toujours se reprendre la prochaine fois: les occasions et les lieux ne manquent pas, les représentants du père céleste y voient depuis des millénaires et, aujourd’hui, se servent des derniers développements des techniques de l’information et de la communication pour ce faire. Et puis, les agences de voyages, les associations sociales, les clubs de loisir y ajoutent leur participation. Le bon Dieu n’a rien à craindre, son marketing est dans les mains de gens compétents en la matière.

Mais, quelquefois, comme dans toute bonne famille unie, des dissensions ont lieu entre les membres. C’est ainsi que les représentants du bon Dieu sur terre se disputent souvent entre eux et entre «clans» religieux, et souvent, au sujet de la nature du Père céleste, ses attributs, son essence, ses buts envers l’homme, ses intentions sur la terre et au ciel, ses projets d’avenir. Ceux qui se disent exégètes, et qui ont l’insigne honneur de connaître le vrai sens et la vraie interprétation des livres saints qu’il a ainsi inspirés à des enfants choisis (encore du favoritisme... décidément...), se contredisent entre eux et entre clans. On lui impute les bonnes actions des hommes mais, curieusement, il n’est pas responsable des autres actions qui sont plus répréhensibles; pourtant, le modèle paternel est le même, et comme les enfants copient souvent les agissements du modèle paternel, ils font de même, puisque lui-même s’est décrit comme jaloux, coléreux, bon, patient, aimable, favorable aux uns et intransigeant envers d’autres, sélectif dans ses sentiments, généreux ou impitoyable contre «ses» ennemis, tel que ses enfants choisis l’ont rapporté dans les livres saints qu’il leur a inspirés. Un père a droit à ses états d’âme, fut-il bon Dieu encore une fois.

Ses enfants imitent son comportement. Ils l’accusent de ne pas prêter l’oreille à leurs revendications de toutes sortes, ou se révoltent quand le père ne répond pas rapidement à celles-ci. Ils le tiennent responsables des phénomènes de la nature et des catastrophes naturelles, qu’on qualifie de «Act of God». En fin de compte, ses enfants lui renvoient en pleine figure leurs propres défauts, agisse-ments, vices, qualités, idées ou concepts, qu’ils ont envers les uns et les autres, sur cette terre. Dieu est ainsi le reflet parfait de sa créature, dans tous ses aspects (N’a-t-il pas créé l’homme à son image, justement? À quoi s’attendre d’autre de lui, dans ces conditions...).

Et comme ce bon Dieu est nommé différemment selon la «famille» qui l’invoque, ou vénéré différemment selon la croyance ou le «portrait» qu’en fait de lui cette famille aux nombreuses «parentés», il est interpellé de toutes les manières et pour toutes les raisons selon la condition des «membres» de cette famille, le lieu de résidence, la situation sociale, les relations entre les membres, etc.

On a fait la guerre sainte en son nom, durant des siècles et aujourd’hui encore, pour s’assurer que les uns et les autres connaissent tous la vérité en ce qui concerne sa nature, ses qualités, ses commandements, ses visées sur le futur de l’homme, ou pour punir ceux qui ne croient pas de la même façon en lui. On l’implore pour qu’il donne la victoire aux belligérants qui, comme les politiciens, sont assurés d’avoir le bon droit de leur côté (et tant pis pour les adversaires, ils n’avaient qu’à accepter la parole des vainqueurs lorsqu’ils disaient que Dieu était de leur côté à eux). On lui demande de faire un miracle pour guérir des malades et, s’il est déjà trop occupé à cette tâche, on demande l’intercession de sa mère, de son fils, ses anges et ses saints, pour en arriver aux mêmes résultats. On l’invoque à tout propos lorsque les échanges verbaux deviennent agressifs ou colériques. On s’en sert pour vendre des effets de commerce, pour promouvoir un produit de consommation, et même pour commettre les pires excès en matière de relations sociales. Bref, comme le disaient ses représentants sur terre il n’y a pas si longtemps, Dieu est partout... et même ailleurs!

Même les pires exactions de l’homme ont droit de présence de Dieu, comme pour en excuser la nature, ou les justifier. Les auteurs d’actes criminels ou de crimes de guerre ont droit eux aussi à des cérémonies nuptiales ou funéraires, avec tout le faste et le décorum religieux qui entourent le rituel religieux. Qu’importe les actions de ces personnes, Dieu est certainement aussi de leur bord, puisqu’il entend les demandes de tout le monde, sans distinction. Une petite pensée de regret et hop!, le bon Dieu récompense ses enfants terribles et le paradis leur est assuré! Et quand les funérailles des victimes de ces actes criminels ont lieu, les représentants du bon Père céleste ne cessent de lui rendre hommage, et de faire état de sa bonté, de son amour pour ses enfants, en oubliant que ces victimes, la plupart du temps, n’avaient aucun motif valable aux yeux du bon Dieu pour mériter ce sort. Mais le bon Dieu est juste, équitable et... bon: il ne fait pas de favoritisme et permet autant à ses enfants terribles de bénéficier de ses sentiments «paternels» à leur égard, comme ça, juste par une petite prière, et les uns et les autres vont se retrouver ensemble au paradis où ils pourront festoyer. À moins que, sur terre, ce ne soit certains de ses représentants qui y voient là des avantages, à l’insu des autres membres de la famille, ou qui craignent ces «enfants terribles» du bon Père céleste...

L’aspect ludique ou pécuniaire n’est pas oublié, loin s’en faut! On le supplie de favoriser une combinaison de chiffres plutôt qu’une autre, d’influencer le mécanisme d’une machine de jeu, de donner un coup de pouce à la chance ou au hasard, d’aider un animal à surpasser les autres, de sélectionner des cartes numérotées, ou des cotes boursières, ou des petites boules sautillantes, bref, Dieu a sa place aussi dans le jeu, le loisir, les activités qui rapportent argent ou honneur. Il a fort à faire pour répondre à toutes ces demandes et suppliques qui lui viennent des casinos, des maisons de jeux, des sous-sols d’églises, des hippodromes, de tous les lieux de paris et où l’argent sert de motif pour ces demandes qui s’égrènent à longueur de jour. Et puisque son nom est mentionné sur la devise d’un des «membres» de sa famille, il est de bon ton qu’on fasse appel à lui pour justifier cette mention... reproduite à des milliards d’exemplaires, tout comme les demandes et les suppliques, d’ailleurs. Et puis, un de ces lieux n’est-il pas qualifié, justement, de «Paradise»? Un paradis en vaut bien un autre, mais il n’y a plus seulement Adam et Ève à satisfaire: des milliards d’enfants, maintenant, attendent de lui qu’il réponde à leurs moindres désirs...

Mais la «créature à l’image de Dieu» n’a cure de cette tâche «surhumaine»: si Dieu est aux côtés des grands de ce monde, en politique, dans les sports, dans le show business, dans l’art militaire, dans les lieux saints ainsi nommés pour lui, pourquoi ne serait-il pas aussi dans ces lieux de divertissement... et de perdition, comme disent certains de ses enfants qui vivent selon ses principes dictés il y a plusieurs générations. Il est donc normal qu’on y trouve des «temples» qui lui sont dédiés, au sein même de ces lieux malfamés, pour que, à son tour, il bénéficie des largesses qu’il a prodigués à ses chenapans d’enfants qui l’ont invoqué pour gagner, même si ce bénéfice, en réalité, profite plutôt à ceux qui ont institué ces «temples» en son nom... à la différence que ces derniers n’en sont plus chassés par son fils, comme il l’avait fait il n’y a pas si longtemps, déjà. Les temps changent, même les temples...

D’ailleurs, pourquoi le bon Dieu n’aurait-il pas sa place dans ces lieux et parmi ces activités de divertissement? Après tout, le septième jour, après sa Création, ne l’a-t-il pas décrété jour de repos -- quoique, à part le paradis, les loisirs étaient très limités à cette époque pour un bon Dieu qui voulait se distraire --, et ce avant même qu’aucun syndicat ou mouvement ouvrier ne s’immisce dans son oeuvre et parle d’heures de travail, de congé payé, de conditions salariales. Trouvez un entrepreneur qui peut créer tout un univers en sept jours, tout seul, sans fournisseurs ni sous-traitants, et vous verrez que la tâche est ardue... même pour un bon Dieu.

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Bref, le bon Dieu est partout, et il est populaire plus que jamais. Il est devenu le «médiateur» le plus demandé de par le monde, et chacun tient mordicus à le considérer comme le plus grand dispensateur de largesses et d’attentions personnelles à son égard. Tout est matière à requérir ses services: politique, affaires, commerce, guerre, paix, loisirs, divertissements, santé, maladie, religion (surtout), toutes les raisons sont bonnes pour en faire une personne importante des activités humaines.

Et pourtant, depuis le temps qu’on le prie, le supplie, l’invoque, le remercie, l’adore, le nomme avec respect, dévotion ou crainte, il n’a jamais gratifié ses «enfants» de sa présence réelle, physique, tangible, matérielle. Oh, certes, les croyants en son existence effective affirment qu’il est réellement présent dans le monde depuis toute éternité, car l’existence de l’Univers le prouve, qu’il a envoyé son fils il y a quelque temps, qui s’est incarné par l’entremise d’une «mère» terrestre, qui est aussi la mère de Dieu puisque le fils est également Dieu-le-père avec le saint-esprit, et que ce «fait» seul suffit à prouver l’existence du père puisque le fils s’est fait connaître à ses enfants grâce à la mère de l’un et de l’autre, laquelle est aussi la grand-mère des hommes de la terre, puisqu’ils sont les enfants de Dieu (méchant problème de lien familial...). Et même si le fils de Dieu n’a pas été reconnu et accepté comme tel par plusieurs «membres» de la famille de Dieu, il continue pourtant à apparaître partout pour bien signifier sa présence, dans les nuages, dans les arbres, dans les maisons, dans des lieux saints et païens, sur les téléviseurs fermés, dans les miroirs, sur un certain suaire, bref sa présence est rapportée partout dans le monde, même s’il ne daigne pas se présenter une bonne fois pour toutes au grand jour, avec ses lettres d’accréditation et ses papiers d’identité.

Il faudra bien que le bon Dieu, qui est père et fils en même temps, et sain d’esprit, sorte un beau jour de l’incognito et manifeste sa présence réelle et arrête de faire languir ses enfants, qui sont à sa recherche depuis des millénaires. Aucun vrai père qui se respecte, et qui respecte de même manière ses enfants, ne saurait les faire attendre si longtemps avant de se révéler, occasionnant pendant ce long temps d’attente toutes sortes de controverses chez ses enfants au sujet de sa personne, de ses attributs, de ses intentions futures... Mais, comme le bon Dieu est à l’image de sa créature, il peut se permettre, comme beaucoup des hommes qui ont perdu de vue leurs propres enfants depuis une longue période, d’être hésitant à se présenter à ses enfants. Après tout, les retrouvailles parents-enfants ne sont pas toujours touchantes, réconfortantes ou empreintes d’un esprit de réconciliation entre les deux partis. Les enfants seraient peut-être déçus de découvrir que, effectivement, le père n’existe vraiment pas et qu’ils sont laissés à eux-mêmes pour décider de leur sort et de leur destinée...

Depuis des lustres, les humains ne cessent d’imaginer un père céleste qui leur ressemble comme deux gouttes d’eau: il est le portrait tout craché de ses enfants turbulents, indisciplinés, querelleurs, vindicatifs, et, quelquefois, bons et aimables envers leur prochain. Mais, plus de 4 000 ans d’attente, ça commence à faire un bail... Pendant combien de temps encore faudra-t-il le faire, en continuant de l’imaginer «à notre image et à notre ressemblance». Le bon Dieu, père céleste, mais «père absent» depuis toujours. Ses «enfants» en prendront-ils conscience, en toute lucidité, vraiment, un de ces jours...?

Claude Mac Duff
on peut joindre l’auteur, et communiquer les commentaires au sujet du texte, à l’adresse électronique suivante:
macduf@cam.org

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