Mont Choisy

Je suis allé à Mont Choisy
Respirer l'air de mon pays.
Là, à travers les filaos
Sous un ciel si bleu si beau
La mer belle et immortelle
Me faisait songer à une demoiselle
Sautillant sur le sable à Grand-Gaube
Ravissante et rayonnante comme l'aube!

À pas feutrés sous les jeunes badamiers
J'écoutais comme jadis sous les palmiers
Le chant des serins et la douce mélancolie
Des vagues se jetant sur le sable  de Choisy:
La nature est seule et triste comme mon coeur
Qui n'a plus ses vingt ans ni sa ferveur
Mais que parfois attise la sombre nostalgie
Des ressacs sur les algues amères de la vie!

Il n'y a rien de plus beau, ô tendre amie!
Que le ciel, le sable et le soleil de notre pays
Quand l'âme endolorie  s'ouvre encore à la vie
Et ose se poser sur les corolles juteuses du paradis.
Et pourquoi pas! Ce n'est que le corps qui vieillit
Alors que le coeur, fontaine de jeunesse inassouvie,
Renouvelle ses eaux d'une essence divine et infinie
Où le poète depuis toujours puise sa mystérieuse vie!

Je marchais seul ce matin-là à Mont Choisy
Je n'avais d'yeux que pour le ciel, que pour la mer
Pour le sable doré que j'ai choisi comme seul ami
Où je pouvais sécher des larmes cruelles et amères.
Je me disais tout bas: Pourquoi y suis-je revenu
Si ce n'est pour faire mes grands et ultimes adieux?
Mais peut-on jamais se séparer de toutes ces avenues
Qui ont vieilli si bien sous notre ciel si radieux?

Reverrai-je un jour Mont Choisy?
Ce que nous réserve le destin, hélas!
Est un secret qui ne nous sera dit
Qu'au crépuscule  et à peu de brasses
De l'Inconnu où s'enfouiront nos souvenirs.
Mais que nous importe notre avenir
Si nous ne pouvons avoir un coin de terre
Où reposer nos cendres, non loin de Péreybère!

Adieu, adieu, ô sable de Mont Choisy!
Je porterai toujours en moi quelques remous
De tos langoureuses vagues, ô ma tendre amie!
Et dans mon coeur que réchauffe un feu doux
Retentira toujours au fil des années qui restent
Le clapotement de tes eaux aux morsures câlines
Qui m'ont rendu fou de joie et de tristesse
Que seul a allégées le souffle des brises marines!


Claudio Wye
Mont-Choisy 
mai 1999
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