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J'ayme la liberté, & languis en service,
Je n'ayme point la court, & me fault courtiser,
Je n'ayme la feintise, & me fault deguiser,
J'ayme simplicité, & n'apprens que malice
:
Je n'adore les biens, & sers à l'avarice,
Je n'ayme les honneurs, & me les fault priser,
Je veulx garder ma foy & me la fault briser,
Je cherche la vertu, & ne trouve que vice :
Je cherche le repos, & trouver ne le puis,
J'embrasse le plaisir, & n'esprouve qu'ennuis,
Je n'ayme à discourir, en raison je me fonde :
J'ay le corps maladif, & me fault voyager,
Je suis né pour la Muse, on me fait mesnager,
Ne suis-je pas (*Morel) le plus chetif du monde ?
Un peu de mer tenoit le grand *Dulichien
D'*Ithaque separé, l'*Apennin porte-nue,
Et les monts de *Savoye à la teste chenue
Me tiennent loing de *France au bord Ausonien :
Fertile est mon sejour, sterile estoit le sien,
Je ne suis des plus fins, sa finesse est cogneue,
Les siens gardans son bien attendoient sa venue,
Mais nul en m'attendant ne me garde le mien :
*Pallas sa guide estoit, je vays à l'aventure,
Il fut dur au travail, moy tendre de nature,
A la fin il ancra sa navire à son port,
Je ne suis asseuré de retoumer en *France,
Il feit de ses haineux une belle vengeance,
Pour me venger des miens je ne suis assez fort.