NEWSLETTER 8 - 26 SEPTEMBRE 1999
"QWAAAAA!!! Ya pas de cartons pour les veloOOOos??!! 40 dollaAArs??...Par personne!!!?? Mais... On vous a appeles 3 fois en 1 mois et cŽest po du tout ce quŽon nous avait dit..." Un observateur situe au comptoir COPA airlines de lŽaeroport de MexicoDF aurait pu saisir au vol pas mal dŽinjures lances a la face des agents passage de la Cie la plus enflure in ze world. Nous finissons par vider, meprisants, nos porte-monnaies BERMUDES(R) sur la comptoir, en ne payant quŽun seul velo, avec dedain, en esperant que la 2e suivra quand meme. Nous embarquons alors... pour Panama (surpriiise), pour une escale de 5 jours avant le Perou. Mais Panama, cŽest deja le Perou. Nous sommes accueillis comme des princes chez la Famille Beaufils-de la Torre, dans un pays qui nŽa pas manque de nous surprendre. Il faut dire que nous nŽarrivions pas vraiment prepares a cette escale-surprise (le billet dŽavion nŽa ete confirme que 2 jours avant le depart). Pour preuve, cet extrait dŽune conversation enregistree a lŽarrivee dans lŽaeroport, a lŽinsu des participants.
Thomas: Hem... Excusez-moi, quelle est la monnaie ici? La vendeuse
: Hein? Heu, le dollar. Thomas
: Non, non.. Pas a lŽaeroport, au Panama. Vendeuse
: Maiis... le dollar... Charles
: Rntudjuuu!! La monnaie na-tio-nale!! Vendeuse : Ah! Le Balboa. Thomas
: Aaaahh, bon. Et... Ca vaut combien un Balboa ? Vendeuse: Bah, un dollar... Charles
: Bon, viens Thomas, laisse tomber, ils comprennent que dalle ici. On sŽcasse. NDLR: La conversation precedente a ete doublee de maniere a rendre accessible le dialecte panameen. Pour la VO, repeter ce meme dialogue le nez bouche et la bouche pleine de marrons chauds. Nous lŽavons vite decouvert, le Panama est une terre de contraste, un pays aux multiples facettes et si je retrouve ca dans le Guide du Routard, jŽexige des royalties. Nous passons 5 jours dans le luxe, a sillonner -en BMW SVP- ce pays, entre Etats Unis (pour les gratte-ciels, les ChipsAhoys et les dollars...enfin les Balboas, jŽai toujours pas bien compris), Caraibes (pour lŽambiance, les noirs et la musique) et Amerique Latine (pour la langue, lŽhistoire et tout le reste). Nos hotes nous nourrissent de bananes, de crevettes et de riz-coco, et nous offrent un voyage extraordinaire vers les iles San Blas ds les Caraibes, ou nous passons 2 jours sous les palmiers dŽune ile deserte a manger des langoustes par lots de 10, a plonger dans les coraux et a visiter les indiens Kuna des iles alentours. Bref, cŽest coule, merci les Beaufils on donnera lŽadresse aux copains. Helas, il nous faut repartir, histoire de faire un peu de velo quand meme, de re-discuter avec nos potes de COPA (3.65 FF TTC la mn) et de paumer notre petit appareil photo avec tout Panama dedans. Nous atterrissons alors a Limaperoo, deballons les velos, raccrochons -les yeux embues de larmes- nos sacoches et leurs autocollants BERMUDES(R) et pedalons comme des oufs jusquŽa chez notre contact, prevenu le jour meme que 2 inconnus debarquaient chez eux a velo. Malgre la surprise, le couple franco-britannique Griffith nous ouvre sa porte et nous passons un sejour confortable et sportif a Limaperoo, a jouer au squash au club LosCondores, a rechercher un appareil photo, a admirer les processions de Santa Rosa (patronne de Lima et dse policiers), et a reluquer les potteries erotiques du Museo del Oro. Bon, cŽest pas tout ca mais nous, on a paye pour en baver, se taper des mega-montees avec pas dŽoxygene et tout. Alors? Hein? CŽest pour bientot ou quoi? Oui, oui, ca arrive... Nous partons fierement, les cheveux caresses par le vent, sur la mythique panamericaine, dans un paysage desertique de dunes de sable, le long du Pacifique. La route est bonne et sans trop de voitures. Nous sommes accueillis sur la route dans une ONG puis chez des proprietaires de haras, contacts fournis par les Griffith. Nous nous nourrissons esssentiellement de bananes, dŽInca Kola -la boisson nationale, gout banane chimique- et dŽenormes menus a 2 ou 3 sols (4 a 6 FF) dans les restaus sur la route. Les peruviens se revelent charmants, et les peruviennes semblent raffoler des cheveux blonds et des yeux bleus. On nous prend en photo, on nous demande en mariage, les filles sont nues et se jettent sur nous, nous admirent, nous tuent, sŽarrachent notre vertu, bref la totale. Bien vite toutefois, nous nous enfoncons dans les montagnes, et les montagnes, au Perou, cŽest haut. Et quand cŽest haut, ca veut dire que ca monte. Les journees se font plus dures et la moyenne de vitesse plonge. Nous ne comptons plus les journees de quelques dizaines de km a peine. Heureusement, jusquŽa Ayacucho, la route est toute neuve, goudronnee, sans voiture, large, pas trop pentue, la meilleure de tout le voyage sans doute. Et surtout, il y a les paysages, extraordinaires, qui changent tous les 10km. Vallees tropicales de bananiers traversees par des vols de perroquets verts, flancs de montagne recouverts de cactus/cacti/cactees, collines vertes ou paissent vaches, brebis et cochons noirs, "puna" en altitude veritables deserts de cailloux et de mousses vert olive, Pitons oranges, roche rouge ou rose, un reste de neige sur les plus hauts sommets. CŽest carrement joli, voire beau. Les cols a franchir se font de plus en plus eleves. Nous depassons allegrement les 4000. Record a Abra Apacheta: 4756m . A cette altitude, les montees sont ponctuees de pauses-souffle toutes les 2mn. Arrives en haut, cŽest lŽemerveillement: des lamas!! Ouaiiss! Supaire! Thomas se poste, appareil au poing, pendant que je rabats les sales betes en courant. Le souci, cŽest que courir a 4700m nŽest pas recommande par lŽassociation francaise des medecins et je tombe illico dans les pommes (Quand Charles fache, lui toujours faire ainsi). Outre les lamas, il y a aussi les bonnes grosses descentes de plusieurs heures, a fond les ballons, penches dans les virages, les sacoches effleurant le bitume. Dans les lignes droites, c'est la course a la pointe. Record absolu pour Chuck "yeager" SV a 80.3 kmh!! Nos deux aventuriers ne reculent decidement devant rien pour repousser toujours plus loin les limites de l'extreme des frontieres du possible... en plus la touche shift de mon clavier peruvien ne marche qu'une fois sur deux alors c'est vous dire si on fait des trucs fous. Nous poursuivons notre petit bonhomme de chemin, accueillis dans tous les pueblos par les cris des enfants "He!Gringo!", qui courent derriere les velos en demandant ds bonbons ou en nous poussant pour nous aider dans les montees. Parfois, nous croisons un barrage de flics en patrouille, qui luttent contre le banditisme et le terrorisme (puisqu'on vous dit que c'est hyper dangereux ce qu'on fait). A chaque fois, ils nous demandent des souvenirs de France pour la police peruvienne. Nous v'la bien, vu qu'on a pas grand chose de superflu. Alors nous equipons la police nationale peruvienne d'autocollants BERMUDES(R), Bermudes qui bientot, sera synonyme d'ordre et de justice, ornant la lunette arriere des 4*4 de ceux qui combattent le crime et les mechants sans relache... Nous dormons bien souvent sous un toit, dans une grange ou une salle commune car sous la tente, il fait ben froid parfois. Thomas s'en fout avec son super sac de couchage en teflon-goretex thermoinsulateur. Moi, avec mon sac plastique de quelques microns d'epaisseur, je suis parfois oblige d'enfiler combi, gants et polaire BERMUDES(R). De jour aussi, me suis bien content d'avoir ma parka BERMUDES(R), une parka qu'elle est bien pour la porter. Un soir, alors que nous avions monte une cote des heures durant, nous reperons au loin, en hauteur, les toits d'un petit village perdu dans la chacra. Epuises, haletants, mourant de faim et ayant essuye une pluie de grelons (heureusement, j'etais protege par la capuche de mon poncho BERMUDES(R)), nous nous prometons d'y diner et d'y dormir. En arrivant, c'est la cata: le village le plus pauvre que nous ayions traverse, pas de tienda, ni bien sur de restaurant. Heureusement, Eusebio, jeune paysan du cru, nous invite a diner chez lui. Pendant que l'on prepare le diner pour toute sa famille (8 enfants), nous sommes invites chez une autre famille (12 enfants), qui nous offre un enorme bol de mais-patate. mmmmh... Ca rechauffe et ca reconforte. Oui, mais le probleme c'est qu'on nous attend aussi chez Eusebio, ou on nous sert 3 portions enOOOrmes de riz-mais-frites, non sans nous avoir offert une soupe, de l'avoine au lait etc etc. C'est bon, mais ca a beau rechauffer et reconforter, Thomas manque de rendre. Le diner va bon train, dans la seule et minuscule piece sombre de la maison en terre de nos hotes. Eusebio est le seul qui parle espagnol, et traduit tout en quechua pour les autres. La mere, en chapeau porte a la peruvienne, haut sur la tete, nous ressert sans arret malgre nos suppliques attendrissantes, pendant que le pere et le fils aine nous bombardent de questions sur le prix de nos velos, de nos lampes de poche, de nos chaussures et de nos habits BERMUDES(R). Nous nous couchons, le ventre rond, dans les lourdes couvertures du seul lit de la famille. Nous avons beau protester, hurler, crier que nous avons sacs de couchage et matelas, rien n'y fait et nous dormirons au chaud sous le toit de tole de cette famille au coeur d'or. Apres de nombreuses autres aventures tout aussi pittoresques dont un concours de cuisine regionale ou Thomas est designe comme membre du jury, est applaudi par une foule d'indiennes en delire et aide a hisser le Cochon d'Inde (prononcer "Cuy", sans jeu de mot douteux), cuisine savamment avec des pommes de terre, en premiere place du concours, nous arrivons a Ayacucho. Nous nous reposerons 2 jours dans cette charmante ville aux accents coloniaux, ou nous rencontrons tout un tas de gens sympa et de filles folles de nos corps. Puis nous repartons vers Cuzco, sur une piste immonde, caillouteuse, bosselee, ou le moindre camion souleve un nuage de poussiere qui nous fait tousser pendant des heures. Sur la route d'Abancay, alors que nous dejeunons en compagnie d'un macon et de son equipe -completement bourres a la chicha, ils nous offrent la soupe, les patates, la coca a chiquer (histoire de sŽanesthesier la langue un bon coup) et le parrainage de la maison (nous avons ecrit notre nom sur les briques d'argile)-, nous apprenons avec stupeur une nouvelle qui nous glace d'horreur et d'effroi... En effet, deux jours plus tot, un groupe de suisses a velo sont passes exactement au meme endroit. Quel affront! Ay ay ay, me duele el corazon comme dirait Rossy War, la star de la chanson peruvienne a la voix suraigue. Nous enfourchons Jean-Mi et Paco sans trainer, et nous lancons a la poursuite de nos adversaires invisibles. Pendant 2 jours, nous luttons contre la montre, jusqu'a ce que nous reduisions l'ecart a une demi journee... La brise andine porte alors a nos narines une odeur fraiche de sang suisse. Nous entamons la descente sur Abancay a quelques kms d'ecart, d'apres les precieux renseignements des quechuas souriants croises le long du chemin. Mais la route nŽest pas favorable a nos montures. Taillees pour lŽasphalte, elles peinent sur la piste caillouteuse qui ne sŽameliore pas, et il nous faut zigzaguer entre les pierres et le sable. Thomas, alors quŽil tente dŽeviter une bosse, se mange le fosse: bobo au coude et au genou. Il serre les dents, releve son velo intact et nous reprenons la route... Soudain, la piste sŽameliore, plus de cailloux, un beau chemin de terre bien aplani. 25 kmh, 30 kmh, 40, 50, les virages se font plus serres. Volant dans un nuage de poussiere, en tete du peloton, je decide prudemment de decelerer a 45 kmh... Trop tard, un virage traitre me contraint a deraper une fois, deux fois, ma monture se cabre et je suis projete en avant dans la terre et les cailloux, alors que mon cheval blesse se traine miserablement au milieu de la route, couche sur le flanc droit, gemissant. Mon coude est ouvert, mon velo explose et mes habits BERMUDES(R) souilles de sable ocre... Je m'evanouis (Quand Charles fache, lui toujours faire ainsi) et m'effondre sur Thomas, maculant de sang sa sacoche avant gauche. Nous arretons un camion peu apres, qui nous descend a Abancay, et je vais me faire nettoyer a l'hopital pendant qu'un garagiste reussit l'exploit de detordre ma roue au marteau et parvient meme a adapter a la perceuse, un vieux garde-boue sur mon velo. Tout est bien qui finit bien, mais nous sommes epuises par tous ces evenemenents et perdons tout espoir de rattraper un jour ces @*#$%! de suisses, en prenant un hotel pour nous decrasser et nous effondrer sur un bon lit. Le lendemain, alors que nous entamons la premiere montee a la sortie de la ville, nous nous tournons et soudain, derniere nous, qui c'est t'y pas qu'a la? Mais oui, petits brigands, vous l'avez devine, LES SUISSES!! Pierre, Herve et Frederic, car c'est bien eux, sont partis de Mexico et vont jusqu'en terre de feu. Nous ferons un bout de route ensemble, au moins jusqu'a Cuzco. Avec nos cheveux peignes, nos mentons rases et nos plis au pantalon, nous constrastons singulierement avec les Tshirts noirs de crasse, les chaussettes puantes et les barbes hirsutes de nos amis suisses. En plus, ils ont un matos de tous les diables et transportent plus de 60kg de velo+bagage: theiere, bouffe (nous on a arrete de la preparer depuis le Quebec), rechauds, jantes, pignons, ils ont une maison sur leurs velos. Si toi aussi tu es en stage, que tu as un ordinateur avec internet et rien a foutre, tu peux decouvrir leurs fabuleuses aventures sur le web, pasque eux c'est des gars serieux qu'ont un site... (http://www.spectraweb.ch/~cornazh) Du coup, on en profite et le premier soir, nous avons le droit a un plat special: pates+avocat+thon+viande hachee avariee+bananes+epices+creme d'asperge+ail, un vrai delice... Nous poursuivons la route en leur compagnie, partageons la route et un sentier annexe en descente (la route est en contruction...a la dynamite), ambiance VTT-Camel Trophy, dur dur pour les jantes. En voulant faire un virage sport en soulevant un nuage de poussiere rouge dans un superbe derapage controle devant Thomas, appareil photo au poing, je m'etale et parfais alors mon look Paris-Dakar, rouge et orange de la tete au pied, a la plus grande joie des suisses. JŽai tout sali mes BERMUDES(R) et ai bien failli mŽevanouir (quand Charles fache, lui toujours faire ainsi) Nous passons une nuit chez un restaurateur-professeur qui nous donne une adresse a Cuzco, celle de ses fils... Rommel et Adolfo. Il nous avoue alors qu'il admire beaucoup Hitler... Au Perou, chez un quechua, ca a un cote surrealiste que nous tenions a partager avec vous tous. Le dernier jour avant Cuzco, je mŽarrete au bord de la route pres dŽun sanctuaire dedie a Nuestro Senor de Huanca, ou a lieu une petite fete. Discussion, rigolade, photo et une grosse erreur de ma part: je bois, sur lŽordre des villageois, deux enormes verres de chicha de mais frelatee, au gout atroce. Ca ne loupe pas, le lendemain, un mal au bide tous les diables me fait peiner dans la montee, puis je vomis mes tripes dans la descente, sous lŽoeil impressionne des quechuas du coin... Je prends un camion pour faire quelques km en me tordant lŽestomac, puis reprends courageusement la route avec les autres, apres avoir vide 10 bouteilles de coca pour calmer tout ca. Il faut avouer quŽavec Thomas, depuis le debut du voyage, les WC/cagouinces/toilettes et les details de notre vie scatologique et intestinale sont devenus un sujet de discussions passionnees et de compte rendus detailles. Des paves-McDo-boucheurs de chiottes americains aux coliques-Popocatepetl du Mexique, vous retrouverez tous ces merveilleux episodes, pittoresques et frais, dans le recueil "Ma Vie Anale", paru aux editions Gallimard. Et cŽest avec emotion que nous penetrons enfin dans la belle et touristique ville de Cuzco, terre promise ou miel et lait coulent a flot... Rendons grace a la Pachamama et dansons tous autour du temple du soleil! Ahuayna! Ahuayna! Que va-t-il advenir de nos deux heros?... Trouveront-ils a Cuzco le seul contact fourni par Thomas? Parviendront-ils, proteges par leur parka BERMUDES(R), a atteindre le Machu Picchu malgre la pluie et les moustiques? Arriveront-ils enfin a delivrer le professeur Tournesol et a percer le secret de la mysterieuse malediction de Rascar Capac? Vous le saurez en lisant le prochain episode des fabuleuses aventures de Thomas "Atahualpa" Jobbe Duval et Charlie "Pachacutec" SV... Cette newsletter est entierement sponsorisee par BERMUDES(R), des habits quŽils sont bien pour lŽaventure... Poutine, on tŽaime