Docteur Jean SEIGNALET,
Ancien interne des Hôpitaux de Montpellier
Maître de Conférences à l'Université Montpellier I (Faculté de Médecine)
PREFACE
au livre de Guy-Claude Burger " Instinctothérapie, Manger Vrai", éditions du Rocher, 1990
Guy-Claude Burger m'a demandé d'écrire la
préface
de ce livre et c'est volontiers que je réponds à sa demande.
Je dois d'emblée préciser que je suis un tenant de la médecine traditionnelle. Externe, puis interne des hôpitaux de Montpellier entre 1959 et 1968, j'ai bénéficié d'une formation valable de médecine générale. Depuis 1968, je dirige un laboratoire d'immunogénétique essentiellement axé sur le système HLA, mais j'ai conservé d'étroits contacts avec les cliniciens. En effet, les groupages HLA ont une grande importance dans le domaine des greffes d'organes et pour le diagnostic précoce de certaines maladies. De plus, les associations évidentes qui existent entre certains antigènes HLA et les affections auto-immunes m'obligent à bien connaître ce secteur de la pathologie.
Si j'ai accepté de rédiger cette préface, c'est parce que j'ai la conviction que les travaux de Burger se rattachent à la médecine classique. En effet, comme celle-ci, I'instinctothérapie repose sur une démarche scientifique rigoureuse.
La démarche scientifique peut procéder de deux façons. Ou bien l'on rassemble des faits que l'on essaie dans un premier temps de relier par une théorie explicative. Ou bien l'on construit une hypothèse que l'on tente ensuite d'étayer par la découverte de preuves. Dans l'un ou l'autre cas, les faits doivent être solidement démontrés et l'hypothèse doit etre logique, compatible avec les connaissances accumulées par de précédents chercheurs.
Celui qui prétend en administrant une vitamine, un sel minéral, un oligo-élément ou un extrait de plante prévenir ou guérir la plupart des maladies, propose un schéma simpliste et aberrant. En effet, une molécule unique ne saurait régir ou catalyser les réactions chimiques complexes qui se déroulent dans l'organisme. Ces faux savants ont cependant des partisans qui, dénués de culture ou d'esprit critique, ont besoin de croire à un traitement miracle, à une panacée. Ainsi vont se constituer des sectes rassemblant des patients plus ou moins fanatiques, suivant aveuglément les prescriptions de visionnaires ou de charlatans.
Il convient de ne pas confondre Guy-Claude Burger avec ces imposteurs. Certes, il propose un régime alimentaire pour lutter contre le vieillissement, le cancer, la dépression nerveuse et les désordres auto-immuns. Mais cela au terme d'un raisonnement bien construit, clair malgré sa complexité et en accord avec les données actuelles de la science.
J'ai fait la connaissance de Guy-Claude Burger en 1983, à l'occasion d'une conférence qu'il donnait à Montpellier. Je fus frappé par son intelligence, sa culture, la mesure de ses propos et très intéressé par la théorie surprenante qu'il présentait. Pendant deux heures, je le mitraillai de questions concernant la biochimie, la génétique et l'immunologie, branches qui me sont familières. Il me répondit à tout de manière satisfaisante et je ne découvris aucune faute dans son exposé. Cinq ans après, malgré une étude attentive et détaillée de ses publications, je n'ai toujours pas décelé de faille. Je ne sais pas si tout ce que dit Burger est vrai, mais tout ce qu'il avance est logique.
L'homme est génétiquement adapté à son milieu naturel et en particulier à son alimentation originelle. Les nombreuses modifications apportées à la nourriture par la civilisation ont pour conséquence une inadaptation des humains, dont les enzymes ne permettent plus de métaboliser correctement les aliments. Certaines molécules non originelles (MNO) franchissent la barrière digestive et s'accumulent dans l'organisme, engendrant des troubles divers et abrégeant la durée de vie normale de l'individu. Le remède est le retour à la nutrition ancestrale: consommation de produits crus, non dénaturés, non pollués, choisis selon l'instinct du sujet. Cet instinct que nous possédons comme les animaux, qui s'est atrophié, mais ne demande qu'à réapparaître s'il est sollicité dans des conditions physiologiques.
Voyons maintenant si ces propositions sont scientifiquement crédibles. Je ne parlerai pas de l'instinct, cette notion ne nécessitant pas de longues explications, pour discuter plus en détail six points.
Cela correspond à une thèse énoncée par Darwin en 1859, thèse qui reste valide, même si elle a été partiellement modifiée ou affinée par d'autres savants. Les espèces dérivent les unes des autres et leur évolution est due à des changements génétiques (mutations, délétions, insertions, duplications, conversions géniques, remaniements chromosomiques), les plus favorables de ces changements étant sélectionnés. Les sujets les plus aptes à survivre dans un milieu donné supplantent les individus moins bien armés.Les précurseurs de l'homme et les hommes primitifs qui vivaient d'une façon proche de celle des animaux ont été soumis à cette loi. La sélection naturelle, exercée pendant une très longue période, a dégagé des êtres adaptés à leur milieu et en particulier à leur alimentation.
A l'époque paléolithique, les hommes vivaient de la chasse, de la pêche et de la cueillette des fruits sauvages. Ils disposaient du feu, peut-être depuis l'apparition de l'Homo sapiens, il y a environ 200 000 ans, mais la cuisson n'avait sans doute qu'un rôle limité, car:
Les ressources nutritives étant faibles, l'Europe n'était peuplée que de petites tribus, séparées par de longues distances. Il y a environ neuf mille ans commence en Asie Mineure l'époque néolithique avec l'élevage des animaux domestiques et l'agriculture. L'augmentation des quantités de nourriture permet aux agriculteurs-éleveurs de multiplier leur population par dix ou par cent. Devenus les plus nombreux, ces agriculteurs-éleveurs envahissent progressivement l'Europe et repoussent dans des régions inhospitalières les chasseurs-cueilleurs. Ceux-ci, pour ne pas disparaître, adoptent le mode de vie des nouveaux arrivants. La révolution néolithique s'est étendue sur quatre mille ans et a finalement touché toute l'Europe.
Ce passage du paléolithique au néolithique est fort bien décrit dans des articles de Menozzi et col., Ruffie et Jean Bernard. Il s'est traduit par trois principaux bouleversements alimentaires:
Ainsi, I'homme s'est complètement éloigné de la nature. En effet aucun animal sauvage ne boit, à l'age adulte, le lait d'un autre animal, ne mange des céréales grillées et n'absorbe d'aliments cuits
Pour ne pas allonger démesurément cette préface, je ne parlerai pas des MNO d'origine glucidique ou lipidique, mais seulement des MNO d'origine protidique.
Les tissus de l'homme sont essentiellement constitués de protéines, elles-memes formées par la réunion d'acides aminés. Pour renouveler ses protéines, l'homme utilise des acides aminés provenant des protéines alimentaires, les unes végétales, les autres animales. Il est donc capital que les protéines alimentaires soient scindées, de manière à ce que soient bien séparés les acides aminés qu'elles contiennent. En effet, si certains acides aminés restent réunis pour former des peptides plus ou moins longs, ils risquent de ne pas être utilisables pour la synthèse des protéines humaines.
Pour prendre une analogie, supposons que les protéines humaines correspondent à des mots français, les protéines végétales à des mots anglais et les protéines animales à des mots russes. Si l'on emploie les lettres séparées extraites des mots anglais ou des mots russes, il sera toujours possible de construire des mots français. En revanche, si certaines lettres restent accolées, les fragments ainsi formés seront souvent impossibles à incorporer dans un mot français. Ainsi, l'association «who» anglaise ou l'association «vitch» russe n'entrent dans aucun mot français.
L'organisme humain dispose de très nombreuses enzymes, dont certaines permettent de scinder les protéines alimentaires. Mais ces enzymes ne sont pas polyvalentes. Leur action est spécifique. Elles coupent les protéines seulement en un point précis, dit site de reconnaissance, particulier à chaque enzyme. Si l'on admet que le bagage enzymatique de l'homme était adapté à son alimentation originelle, il est fort probable qu'il convient mal pour certaines MNO. Les enzymes se trouvent confrontées, d'une part à des protéines nouvelles, d'autre part à des molécules complexes, engendrées par la cuisson.
Cinq mille ans constituent un laps de temps beaucoup trop réduit pour que soient sélectionnés les individus adaptés à cette nouvelle nutrition. En effet, la pression sélective est faible. Les troubles provoqués par la nourriture moderne surviennent tard dans la vie et n'empêchent pas la plupart des sujets atteints de procréer. Par suite, certains humains ne seront pas correctement outillés pour scinder totalement telle ou telle protéine. Il peut s'agir d'un déficit quantitatif (enzyme idéale absente ou réduite en quantité) ou d'un déficit qualitatif (présence d'un variant d'activité diminuée par rapport à l'enzyme idéale). L'existence de tels variants ou allo-enzymes est largement démontrée. Ainsi le déficit en glucose 6 phosphate déshydrogénase est presque toujours dû à la présence d'une allo-enzyme peu efficace. Quel que soit le gène pathologique, il doit être présent à l'état homozygote pour provoquer un déficit enzymatique. En effet, chez les sujets hétérozygotes, le gène normal va compenser le gène pathologique. L'hérédité du trouble est donc récessive.
Les conséquences du déficit enzymatique seront une scission incomplète de certaines protéines, avec persistance de peptides formés d'un nombre variable d'acides aminés.
Jusqu'à présent, nous n'avons découvert aucun motif pour réfuter le raisonnement de Burger. Voici maintenant que se présente un obstacle sérieux, avec le dogme de l'imperméabilité de la paroi intestinale aux peptides. Rappelons quelques notions de physiologie sur la digestion.
La scission des protéines alimentaires se déroule dans l'intestin sous l'influence des sucs digestifs, les protéines sont dégradées, pour 30 % d'entre elles en acides aminés et pour les 70 % restants en oligopeptides comportant deux à six, peut-etre sept acides aminés. La dégradation des oligopeptides se poursuit dans les entérocytes qui disposent de peptidases au niveau de la bordure en brosse et dans leur cytoplasme. Il est généralement admis que la barrière intestinale, du moins chez l'adulte, ne laisse passer dans le sang portal et dans les lymphatiques que des acides aminés. En fait, ce point n'a jamais été valablement démontré. Quelques expériences concernant un faible nombre de dipeptides ou de tripeptides ne permettent pas de prévoir le destin de soixante-quatre millions d'hexapeptides possibles, formés par les combinaisons de vingt acides aminés (20 à la puissance 6). De plus, la démonstration qu'un oligopeptide est totalement scindé chez un individu n'autorise pas à conclure que la situation est identique chez tous les humains. Le même peptide peut échapper à l'hydrolyse chez les sujets ayant un déficit pour l'enzyme indispensable à ce processus.
Tout comme Burger, je crois que de faibles quantités de peptides
peuvent traverser la paroi intestinale. Plusieurs éléments
sont en faveur de cette thèse:
Dans toutes ces maladies, les troubles sont la conséquence d'une réaction immunitaire qui implique la pénétration d'un antigène dans l'organisme. Or les lipides purs ne sont pas immunogènes. Quant aux glucides purs (polyosides), ils ne sont immunogènes que si leur poids moléculaire dépasse cent mille et les lymphocytes T ne participent pas à la réponse contre ces polyosides. Il est donc logique de penser que l'antigène responsable est un peptide.
Les peptides qui franchissent la paroi du grêle vont s'accumuler dans l'organisme lorsque les apports dépassent les capacités d'élimination par les émonctoires. Ces peptides sont de structure variable d'un sujet à l'autre, selon que le déficit affecte telle ou telle enzyme. Ils iront se fixer préférentiellement sur des cellules possédant des récepteurs adaptés à leur molécule. Des homologies structurales entre le peptide étranger ou hétéropeptide et un autopeptide habituellement utilisé par la cellule peuvent tromper celle-ci. Les cellules vont capter le peptide, en l'englobant dans une vésicule qui l'entraîne à l'intérieur du cytoplasme. C'est le processus appelé pinocytose.
L'hétéropeptide que la cellule ne peut ingérer dans son métabolisme va être stocké. Ainsi:
Je m'étendrai plus longuement sur la polyarthrite rhumatoïde qui appartient au groupe des maladies dites auto-immunes. Le mécanisme de ces états demeure mystérieux. Or si l'on assemble la conception de Burger et de récentes découvertes concernant les antigènes HLA, on peut construire une hypothèse qui explique totalement la constitution de la polyarthrite rhumatoïde (PR) et qui est applicable à d'autres affections auto-immunes.
Certains antigènes HLA nommés HLA-DR offrent des associations avec la quasi-totalité des désordres auto-immuns. Ainsi, les malades atteints de polyarthrite rhumatoïde possèdent beaucoup plus souvent que les témoins normaux des antigènes HLA-DR4 et HLA-DR1. Le rôle biologique des molécules HLA-DR a été élucidé par les récents et remarquables travaux de Babbitt et coll., Guillet et coll., Buus et coll. Ces molécules portées seulement par les cellules qui participent à la réponse immunitaire (macrophages, lymphocytes T activés et lymphocytes B) ont une quadruple fonction:
Grâce à la cristallographie et avec l'aide d'un ordinateur, Bjorkman et coll. ont visualisé la structure dans l'espace d'un antigène HLA de classe l. On y remarque un sillon permettant de loger un peptide de huit à vingt acides aminés. Il est très vraisemblable que les antigènes HLA de classe II, en particulier les antigènes HLA-DR, sont munis d'un même sillon qui leur sert à fixer, transporter et présenter les peptides.
La polyarthrite rhumatoide (PR) est considérée par les spécialistes comme une maladie polyfactorielle, où interviennent des facteurs génétiques et des facteurs de l'environnement. Ces derniers ne peuvent être que des germes ou des aliments.
La responsabilité des germes n'a jamais été démontrée. Et pourtant bien des travaux ont été consacrés à diverses bactéries, divers mycoplasmes, divers virus. Aucune preuve n'a pu être obtenue, si bien qu'une revue générale publiée en 1984 conclut à l'échec des recherches concernant les germes dans la PR. La même faillite a été enregistrée dans les autres maladies auto-immunes, malgré de nombreuses explorations, notamment dans la sclérose en plaques et le diabète sucré insulino-dépendant.
A l'inverse des germes, les aliments ont donné lieu à peu d'investigations. Il existe cependant de bons arguments pour les suspecter.
Il s'agit de la maladie coeliaque et de la dermatite herpétiforme, toutes deux associées à DR3 et DR7. La protéine causale est la gliadine du gluten, substance contenue dans la farine des céréales. Un régime sans gluten suffit à entrainer la guérison.
Admettons donc qu'un peptide X, issu d'un catabolisme insuffisant d'une protéine alimentaire Y, soit à l'origine de la PR. X traverse l'intestin et va se fixer préférentiellement sur certaines cellules du cartilage articulaire, les chondrocytes où il s'accumule au fil des ans. A l'état physiologique, les antigènes HLA-DR sont exprimés seulement sur la membrane des cellules participant à la réponse immunitaire. Mais il n'en est pas ainsi au cours des maladies auto-immunes. Les antigènes DR apparaissent électivement sur les cellules de l'organe lésé. Cela fut découvert sur les cellules thyroidiennes au cours de la maladie de Basedow et de la thyroidite de Hashimoto, par Bottazzo et coll. Un tel phénomène est constamment retrouvé dans les états auto-immuns et il est attribué à une libération d'interféron par les lymphocytes T activés, par un virus ou par un stress en particulier.
Or, récemment Jahn et coll. ont observé que les molécules DR, absentes sur les chondrocytes normaux, apparaissent sur ces cellules au cours de la PR ou sur des cultures de chondrocytes où l'on ajoute de l'interféron.
Cela suggère que les molécules DR vont se lier au peptide X stocké dans les chondrocytes, le transporter à la surface cellulaire et le présenter aux lymphocytes T. DR4 et DRl ayant pour X une affinité plus forte que les autres antigènes DR présenteraient de plus grandes quantités de molécules X, réussissant le plus souvent à activer les Iymphocytes T. Ceux-ci déclenchent une réponse immunitaire orientée contre X et qui aboutit à la destruction des chondrocytes.
En somme, le stade initial de la PR serait une hétéro-immunisation dirigée contre un peptide étranger X et se traduisant par la destruction d'autocellules. Cela s'inscrit dans le comportement habituel de l'organisme, dont les défenses tolèrent le «soi», mais visent à éliminer le «soi altéré». Ainsi sont lysées les cellules infectées par les virus. Pourquoi pas les cellules surchargées par les peptides alimentaires ? Notre conception diffère de celle de Bottazzo qui propose une présentation aux T de DR + autopeptide, alors que nous suggérons DR + hétéropeptide.
La différence entre la réponse antivirale et la réponse anti-X est que la première est aiguë, de durée limitée, alors que la seconde passe à la chronicité. Cela n'est pas surprenant, car une fois les virus tués, la stimulation antigénique disparait et la réaction immunologique s'arrête. Au contraire, dans la PR, l'apport répété de la protéine Y dans la nourriture est suivi de nouvelles arrivées de X au niveau des cartilages. La stimulation antigénique est maintenue.
Quelles conséquences pratiques tirer de ce schéma? Nous ne sommes pas capables de modifier les gènes de susceptibilité (déficit enzymatique et HLA-DR). Un régime alimentaire excluant la protéine Y, source du peptide X, parait indiqué. C'est ce que propose Burger.
La diététique peut donc prétendre à un double but: curatif et préventif.
Ces notions, mises en évidence par la PR, sont transposables aux autres indications de l'instinctothérapie. On retrouve toujours la tétrade: spécificité, innocuité, association permise avec d'autres traitements, visée curative ou préventive.
Le régime «cru» est donc séduisant. Cependant, il n'est pas d'application facile. Il demande une volonté sans faille du patient. Il nécessite une bonne organisation pour se procurer un choix satisfaisant d'aliments originels. C'est d'ailleurs un des grands combats de Guy-Claude Burger que la mise en place d'une telle organisation.
Pour aussi attractive que soit une théorie, elle doit être justifiée par des résultats pratiques. Burger les présente dans son ouvrage. Il possède d'autre part des films, des documents et des attestations qui témoignent de l'efficacité de sa méthode.
Bien que mes activités de biologiste m'aient éloigné de la clinique, j'ai pu vérifié cette efficacité dans trois domaines:
Jusqu'à présent, les diététiciens se sont surtout attachés à des problèmes quantitatifs: vitamines, sels minéraux, calories, équilibre entre glucides, lipides et protides. L'instinctothérapie se préoccupe davantage de la structure des aliments, seul moyen d'éviter l'accumulation dans l'organisme de MNO non scindées par des enzymes mal adaptées. Elle quitte le quantitatif pour le qualitatif, le macroscopique pour le microscopique, l'échelon pondéral pour l'échelon moléculaire.
Guy-Claude Burger est donc un novateur et, comme beaucoup de ses prédécesseurs, il a des difficultés à se faire entendre. Bien des vérités qui nous paraissent aujourd'hui évidentes ont été mal accueillies au départ. Galilee, après avoir prouvé en 1632 la rotation de la Terre, dut abjurer devant l'Inquisition. Harvey qui découvrit vers la même époque la circulation sanguine connut aussi bien des ennuis. Darwin, au siècle dernier, vit ses écrits sévèrement condamnés par de nombreux officiels, y compris dans son propre pays. Il est vrai que ses propositions étaient incompatibles avec la Bible, le Coran et le Talmud. Les obstacles que doit affronter Burger ne sont pas d'ordre religieux, mais n'en sont pas moins considérables. Dans un premier temps, il doit convaincre de la véracité de ses assertions. Or il s'attaque au pain, au lait, à la cuisine qui font partie des fondements de notre civilisation. C'est une croisade difficile.
Supposons que les idées de Burger soient admises. Pourront-elles être appliquées en pratique ? Assez aisément, tant qu'il ne s'agira que d'une minorité d'initiés. Mais l'extension sur une grande échelle serait une véritable révolution. Il faudrait modifier l'agriculture, l'élevage, la restauration et bien d'autres choses, bref changer de société.
Voilà un homme qui risque, d'abord de déranger les scientifiques, ensuite de déranger beaucoup de ses concitoyens. Heureusement, on ne brûle plus les novateurs. C'eût été une fin imméritée pour un individu ennemi de toute cuisson.
En conclusion, je considère Guy-Claude Burger comme un chercheur brillant, cultivé, logique, qui mérite d'être écouté et jugé impartialement. Il serait bon que des équipes médicales et scientifiques l'aident à réaliser des expériences plus étendues qui permettront d'infirmer ou de confirmer ses originales conceptions.
Et si sa théorie est validée, il serait souhaitable que lui soient donnés les moyens de poursuivre ses travaux dans de bonnes conditions. C'est le voeu que je formule, en achevant la préface de cet intéressant ouvrage.
Docteur Jean SEIGNALET Ancien interne des Hôpitaux de Montpellier Maître de Conférences à l'Université Montpellier I (Faculté de Médecine)