Royale Union Saint-Gilloise
Pierre Vansintjan
Union - Virton 0-2 La visite des leaders est toujours un évènement au Parc Duden et à défaut de faire stade comble on pouvait noter des visiteurs de marque dans la tribune centrale, notamment deux anciens entraîneurs de l'Union. C'est aussi une bonne occasion pour nos troupes de se transcender. Déjà en division II, dans une position quasi désespérée, on avait livré un bon match contre Beveren avant de craquer dans la dernière demi-heure (0-2). Depuis notre retour en troisième division on battit ensuite le SK Roulers (2-0) avec une équipe jouant les places d'honneur et Ingelmunster (3-2) avec une équipe aussi mal lotie que maintenant. La saison dernière, toutefois, on dut baisser pavillon devant un Strombeek conquérant qui passa l'essentiel du match à camper dans notre moitié de terrain (0-2). Virton présentant l'étonnante caractéristique pour un leader d'être l'équipe avec laquelle on voit le moins de goals (34 en quinze matches et seulement trois de plus que nous du bon côté), on s'attendait à un match serré, peut-être avec un seul but et où le premier qui marquerait prendrait sans doute un avantage déterminant. Notre secret espoir gisait dans les effets du soleil hivernal déclinant sur la vista de notre ancien capitaine Pedro Gomez. La seule inconnue était la manière des visiteurs d'aborder le match. On fut vite fixé. La veille avait eu lieu le troisième tour de la Coupe d'Angleterre avec son lot habituel de matches échevelés et dès le coup de sifflet initial de Mr. Jacky Quaranta on eut l'impression que Virton revenait tout droit des Iles. C'est en effet dans le plus pur style britannique que Virton prit d'emblée la direction des opérations en pratiquant un football d'un rythme supérieur d'au moins une division, en faisant le forcing sur tout le terrain, en remportant quasi tous les duels et en étouffant dans l'oeuf les maigres velléités unionistes de réaction par l'application du hors-jeu. Une application que la rapidité de leur jeu combinée au statisme de nos troupes rendait assez facile d'ailleurs. On en avait plein les pieds et on reculait instinctivement pour parer au plus pressé, tout trou colmaté en ouvrant automatiquement un autre. Heureusement pour nous les visiteurs dépensaient plus leur énergie à s'assurer, avec un brin de cabotinage, la conquête du ballon qu'à soigner la finition de leurs actions. Il fallut ainsi attendre la 15ème minute pour voir la première véritable occasion de but du match sous la forme d'un tir décidé de Roland Saboga s'infiltrant par la droite que Thierry Coppens parvint à détourner en corner. Cette phase conforta-t-elle Virton dans l'inéluctabilité de leur victoire à venir ? Toujours est-il qu'ils connurent alors un passage à vide et permirent à l'Union de mettre le nez à la fenêtre par trois fois. Oui, trois ! On n'en croyait pas ses yeux et on pensait même que nos gars se réveillaient enfin. A la 17ème minute Yves Cums parvint à lancer Anthony Lorenzo sur la droite, lequel parvint à déjouer cette fois le piège du hors-jeu. Son centre fut toutefois intercepté par une défense attentive. A la 18ème, dans son style habituel, Axel Vergeylen parvint à s'infiltrer entre deux adversaires sur la droite et à filer pleins tubes vers Pedro Gomez qui démontra à cette occasion qu'il n'avait rien perdu de sa classe. Et à la 20ème on eut le plus beau (mais aussi le seul) mouvement construit de l'Union lorsqu'Yves Cums au milieu du jeu tira à ras de terre un coup franc vers Anthony Lorenzo qui prolongea vers la droite à Axel Vergeylen fonçant à nouveau pleins tubes pour centrer vers le deuxième piquet un ballon que reprit de la tête, mais malheureusement au-dessus,... Thierry Capouet ! Parce que Thierry joua tout le match dans une étonnante position que ma bouteille m'incite à appeler "d'ailier gauche". En fait, un médian latéral gauche dans le style moderne actuel de Ryan Giggs ou Bart Goor. C'est peut-être une idée à creuser devant des adversaires moins coriaces et en travaillant la finition aux entraînements. Mais dans ce match-ci ce fut sa seule opportunité. Parce que c'est à ce moment que Virton montra sans doute le mieux qu'il était le leader de la série. Son passage à vide, en effet, ne dura guère plus longtemps que ceux de McEnroe dans sa splendeur. Ces trois signaux d'alarme n'avaient pas rendu Michel Le Flochmoan insensible et il regalvanisa en un rien de temps ses troupes, et cette fois définitivement. Dès la 22ème minute un corner de la gauche tiré par le super-remuant Remy Mukenge (arrivé à Virton dans l'entre-saison et qui en fit voir de toutes les couleurs à Francis Mangubu) fut dévié superbement de la tête par Roland Saboga au centre vers le second piquet où un plongeon désespéré de Thierry Coppens l'écarta en corner. Le ton était à nouveau donné et la physionomie du premier quart d'heure se reproduisit jusqu'à la pause. C'est-à-dire une mainmise de plus en plus affirmée de Virton sur le match mais ne se concrétisant que par peu de réelles occasions de but grâce aux dégagements désespérés de notre défense (qui n'arrivaient JAMAIS à un équipier alors que les visiteurs se trouvaient régulièrement les yeux fermés) et en raison d'un certain manque de lucidité à la finition côté Virton, oh combien salutaire pour nous. A la 36ème minute, déjouant le piège du hors-jeu, Roland Saboga rata une occasion en or d'ouvrir le score en plaçant trop finement le ballon à droite de notre but. Et à la 40ème Stéphane Martine conclut une attaque rapide en tirant à côté. Anecdotiquement, on parvint à forcer un corner sur la droite en vue du repos et sur le botté de celui-ci Francis Mangubu écopa d'une carte jaune. Et ce fut la pause durant laquelle le préposé au micro souleva les supporters de Virton par l'annonce des scores intermédiaires à Visé. Parce qu'en plus d'être leader du championnat, Virton l'est aussi de la deuxième tranche et de façon tout aussi autoritaire. De notre côté on se demandait comment on tenait encore le 0-0. Ça ne dura plus très longtemps. Le briefing de Michel Le Flochmoan dut être convainquant car Virton reprit le match encore plus le pied au plancher qu'en première mi-temps et mit carrément le turbo durant le quatrième quart d'heure. Dès la 47ème minute un énième dégagement à l'aveuglette de notre défense aboutit à Roland Saboga qui tira instantanément au-dessus. Et une minute plus tard ça y était ! Une attaque fulgurante de la gauche eut raison de la ténacité de Francis Mangubu et fut terminée victorieusement au centre par Stéphane Martine (0-1). Les Cybers avaient fêté Laurent Zaccaria pour son trentième anniversaire et il eut alors une réaction d'amour-propre. A la 51ème minute, lui dont on dit qu'il est lent, s'infiltra avec autorité dans l'axe et fut fauché par deux adversaires à quelques mètres du rectangle. Le coup franc qui s'ensuivit donna lieu à de nombreuses palabres et ça nous aurait arrangé qu'on puisse appliquer la règle des dix mètres actuellement en test dans la Premier League anglaise. On dut rester "à quelques mètres du rectangle" et finalement Anthony Lorenzo tira à côté. A la 55ème minute des erreurs en série de notre défense, une nouvelle fois prise de vitesse, offrirent sur un plateau le deuxième but à Remy Mukenge mais celui-ci galvauda l'occasion. A la 61ème il fut plus concentré en terminant victorieusement sur une passe de Roland Saboga à la suite d'une nouvelle attaque fulgurante (0-2). Le match était définitivement joué et il n'y eut plus grand chose à raconter. Virton géra son avantage sans diminuer pour autant l'intensité athlétique de son jeu. A la 64ème minute Axel Vergeylen se fit ainsi faucher sèchement à l'entrée du rectangle par Steve Gustin et se releva en exprimant sans ambages ses sentiments à Mr. Quaranta, lequel se montra assez laxiste tout au long de la rencontre dans un sens comme dans l'autre. Il s'ensuivit une carte jaune qu'il me parut décerner à Steve Gustin mais plusieurs personnes autour de moi eurent l'impression qu'elle le fut à Axel. Et la presse n'éclaire pas le mystère. Le Soir l'attribue à Axel et La Dernière Heure à Steve ! Allez savoir... Et vite de préférence. Il y a intérêt à avoir copie du rapport de l'arbitre. Quoiqu'il en soit il y eut coup franc qui ne donna rien non plus. Au plus le temps passait, au plus il était difficile aux Unionistes de cacher leur frustration. Cela valut ainsi une carte jaune à Anthony Lorenzo (étonnante de sa part) à la 68ème minute et une autre à la 81ème, pour rouspétances, à Yves Cums (de plus en plus écoeuré de devoir se battre au milieu du terrain contre deux ou trois adversaires à la fois, le statisme de nos troupes déjà apparu durant le premier quart d'heure n'ayant pas du tout, mais alors pas du tout, disparu). Entre-temps, juste après sa carte, Anthony était descendu, de même que Jean-Paul Ribeiro (qui fut complètement muselé durant tout son temps de jeu) et ils avaient été remplacés par Christophe Locci et Zekrija Poturovic. Comme chacun sait, entrer dans une équipe qui ne tourne pas est rarement un cadeau (tout le monde ne s'appelle par Karl-Heinz Rumenigge; un pot au premier qui situe historiquement cette allusion) et, à part une combinaison sur la gauche deux minutes plus tard entre Zekrija et Axel Vergeylen se terminant par un centre au second piquet sur lequel Christophe se montra trop court, ces changements ne donnèrent rien, la défense de Virton s'y adaptant rapidement. Si bien que depuis le deuxième but les choses les plus intéressantes se passèrent en tribune avec des débats d'idées animés entre supporters des deux équipes, notamment sur le rôle de la Marseillaise dans les performances de Virton, voire même avec des sous-débats conjugaux. Mon aimable voisin était supporter des verts et blancs (qui jouèrent tout en blanc, ce qui n'empêcha pas nos gars de jouer à nouveau avec leurs horribles culottes jaunes) et me fournit des informations sur son club préféré dont le titre (probable au vu de leur prestation) ne figurait pas du tout dans les ambitions d'avant-saison et leur causerait autant de problèmes que de joies. Son petit-fils, Julien Cocomeri, figurait sur le banc et il eut le plaisir de le voir monter à cinq minutes de la fin. Et ce fut la fin au soulagement général des supporters visiteurs enchantés du résultat, et des supporters unionistes de plus en plus transis et qui les félicitèrent et leur souhaitèrent un bon retour. Notre capitaine Roger Hénuset, toujours réduit à l'inactivité, tenta de consoler comme il put ses troupes au retour aux vestiaires et ne manqua pas d'adresser son accolade à son prédécesseur Pedro Gomez tandis que Laurent Zaccaria et Lionel Zanini faisaient le point de la situation ensemble. Et voilà. Les lampions sont éteints comme après Belgique-Turquie, encore que là on fit quand même meilleure figure. Car il n'y a guère de longs commentaires à faire sur ce match. Nous avons été surclassés par le visiteur le plus autoritaire qu'on ait vu depuis bien longtemps (Westerlo il y a quatre ans peut-être ? Je n'ai pas vu ce match.). Un visiteur donnant l'impression de venir au moins de la division II et ayant produit sans doute une de ses meilleures prestations de la saison, le jour-même où ses trois derniers rivaux pour le titre perdent simultanément deux points. La chance se forge et se mérite. On ne peut que leur souhaiter bon vent (pour battre tous nos rivaux à nous, par exemple) et leur espérer de trouver les moyens matériels nécessaires pour monter. Quant à nous, il faut remettre d'urgence les pendules à l'heure. Rarement a-t-on vu l'Union aussi impuissante sur le terrain. La supériorité de Virton n'explique pas tout et une défaite par 2-4 eut été bien plus honorable que ce 0-2 donnant l'impression que nos visiteurs n'ont pas voulu nous humilier au score. En première mi-temps, à part quatre minutes d'utopie, l'Union a été désespérément statique et la disposition de ses joueurs à des kilomètres les uns des autres ne faisait que renforcer ce statisme. En seconde mi-temps elle fut tout simplement sans âme. A Madrid, sous une domination au moins aussi écrasante et dans un match qu'il pouvait se permettre de perdre (ce qui n'était pas précisément notre cas), Anderlecht eut à coeur de sauver l'honneur. Ici qu'a-t-on fait pour ça ? Ce fut donc à la fois un fiasco collectif et douze fiascos individuels. Seul échappa au naufrage notre gardien qui permit de maintenir le suspense au moins jusqu'au repos, renouvelant sa prestation du match aller. A la Lazio on peut se permettre ça, mais à l'Union ??
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