Royale Union Saint-Gilloise
Pierre Vansintjan
Cyber-Rencontres de Noël A 102 ans l'impact de l'Union sur ses supporters de toutes générations est toujours indélébile, même au-delà des Alpes. Grâce à son Caran d'Ache électronique on avait ainsi déjà pu apprécier l'enthousiasme demeuré intact de notre ami Frédéric Neumann, né à Bruxelles mais reparti au pays de ses ancêtres juste après le but de la remontée de Paul Schraepen en 1968, et soulagé par celui-ci. Il y est devenu un brillant journaliste sportif à la Télévision de la Suisse Romande, ce qui lui permit de voir un nombre non négligeable de matches de grand intérêt... à l'exception de ceux de l'Union ! Sa frustration de ne plus pouvoir applaudir ses jaunes et bleus se sentait dans les nombreux écrits dont il nous honorait (ainsi que LA BUTTE, voir le dernier numéro). La possibilité de revoir la ville de son enfance à l'occasion de l'Euro 2000 lui souriait mais ne se présentait que comme un moindre mal puisque l'Union serait déjà en vacances. Aussi lorsque notre dynamique webmaster Danny Christiaens lui annonça qu'une cyber-journée était organisée à l'occasion de la reprise de la pièce BOSSEMANS ET COPPENOLLE A HOLLYFOOT avec en prime la présence de Paul Vandenberg venant saluer les Cyber-Unionistes, on eut droit au dialogue électronique suivant : Frédéric (à Genève) : PAUL VANDENBERG !? Ah, comme j'aimerais y être. Danny (à Schaerbeek) : Eh bien, c'est simple : tu prends l'avion et tu viens ! Frédéric (à Genève) : J'arrive ! Et Frédéric arriva ! Vendredi soir à Zaventem, et chaleureusement accueilli (il y avait intérêt avec la température) par Danny et les fidèles Vdl Brothers, à savoir Michel et Laurent. Bientôt renforcé par Vincent Gomez, notre comité d'accueil emmena illico notre hôte se réchauffer devant une bonne table à la Brasserie Cochaux. La cyber-journée devenait un cyber-week-end avec comme mise en appétit le match de Laurent au New Inn en ABSSA le samedi après-midi, la rencontre avec Paul Vandenberg en entrée, la pièce comme plat de résistance et le match du lendemain contre Torhout comme dessert, sans parler de nombreux entremets auxquels nous incitaient les premiers flocons de la saison. Le lendemain votre serviteur rejoignit le groupe pour l'apéro chez Michel à Stockel, faisant la connaissance de l'ambiance le samedi matin à la place Dumon et expérimentant le labyrinthe des travaux du quartier. "Quite an experience !" dit-on Outre-Manche. Le contact se fit au quart de tour, Frédéric se révélant aussi sympathique dans le monde réel que dans le virtuel. Les matches de l'ABSSA avaient été remis en bloc et Laurent était retourné potasser son examen d'espagnol qui l'attendait lundi. C'est donc dans une totale sérénité que notre quintette alla se sustenter au Baron proche en y poursuivant ses échanges de vue. Frédéric y évoqua ses souvenirs jaunes et bleus, empreints de nostalgie bien entendu. S'il n'eut pas la chance de connaître Jacques Bastin (il put se rattraper le soir) il rencontra un autre glorieux membre de l'Union 60 en la personne de Soitje Van den Eynde mais ne put malheureusement le convaincre de ses arguments footballistiques. Cela ne l'empêcha toutefois pas de porter d'autres couleurs jaunes et bleues. Il nous parla aussi de l'Euro 2000 qu'il viendra couvrir, non seulement pour les matches proprement dits mais aussi pour leur contexte qu'il se propose de montrer dans des flashes quotidiens. On ne manqua pas de sauter sur l'occasion de lui fournir des idées en commençant par la convivialité du club qui nous est cher à tous. On enchaîna sur le fait que le football ne se limite ni à la logique inhumaine de l'argent ni aux hooligans. Et de lui citer un joueur exemplaire, digne de son brassard de capitaine et âme de son équipe, exerçant le métier, de plus en plus exigeant de nos jours, d'enseignant, et exprimant sa sensibilité artistique en public. Et de parler aussi du football belge qui après une mauvaise passe sort la tête hors de l'eau grâce à la bouffée d'air frais que lui donnent de nouvelles équipes comme Mouscron et Genk. Le sport n'est-il pas, par essence, la perpétuelle remise en cause des valeurs établies comme l'affirma haut et fort LE MIROIR DU FOOTBALL à l'époque de Paul Vandenberg ? Nous l'incitâmes donc, encore tout remplis de notre propre souvenir, à aller voir l'Excelsior et sa gestion à la fois moderne et humaine comme en atteste son école des jeunes et l'accueil réservé aux enfants dans son stade. En outre peut-on traiter de l'Euro 2000 sans parler de l'Europe ? Branko Strupar n'est-il pas un exemple type du vent nouveau qui souffle sur notre continent ? Le temps fila ainsi au Baron au cours de cette conversation passionnée qui aurait sans doute pris tout l'après-midi si Danny n'avait sagement proposé de manger "léger" en prévision de l'après-pièce. Frédéric avait ainsi stoïquement choisi un américain (dit-on "tartare" en Helvétie ?) mais lorgnait quand même vers les moules de Vincent qui, lui, ne venait pas le soir. Bon prince celui-ci lui en fit goûter une et notre hôte fut au nirvana. Après l'Union ce sont les moules qu'il regrette le plus en Suisse. Rassurez-vous, il se rattrapa bien le soir. C'était la foire de Noël sur la place Dumon et au centre commercial proche. Se souvenant de la fin de LA SALAMANDRE, film suisse mythique s'il en fût, on arpenta les stands à notre aise en admirant notamment celui des cartes postales de collection (il y en avait tout un tas sur la maison Stoclet). Avec fierté Michel nous montra aussi le STOCKEL, seul cinéma de quartier de Bruxelles avec le MOVY. Décidément on ne pouvait chasser longtemps l'Union de notre esprit. On se sépara alors pour se préparer pour la deuxième cyber-rencontre du week-end. Pendant que Danny reconduisait Frédéric à son hôtel Michel initia avec conviction votre serviteur au DVD jusqu'à l'arrivée de Laurent et Lili. On partit alors aux Tréteaux de Bruxelles, rue de Laeken juste en face du Théâtre Flamand. On n'ouvrait pas encore mais l'inévitable "bistro à côté" l'était et on y retrouva Frédéric, Danny et ses parents. Le cadre était agréable avec plein d'affiches de cinéma aux murs et on y mobilisa une rangée de tables. On avait chambré Laurent en cours de route et il ne manqua pas l'occasion d'offrir à Frédéric ses services de consultant photogénique sur les gardiens de but du Tournoi. Bientôt nous rejoignirent Roger Henuset, Guy Thelen et son épouse, et bien sûr Paul Vandenberg. Au petit jeu du nombre de faits d'armes dont on se rappelait de sa part, Frédéric et moi avions fait match nul. Ce nous fut donc également émouvant de pouvoir le rencontrer et converser avec lui. L'émotion n'était certainement pas moindre que pourrait l'être celle de Français de notre génération rencontrant Raymond Kopa. Emotion du reste partagée par tout l'auditoire. De son côté Paul était heureusement étonné de voir qu'il existait encore de jeunes fervents Unionistes. La conversation fusa de toutes parts, souvent empreinte de nostalgie de l'époque où quatre équipes se partageaient la vedette à Bruxelles. Le père de Danny évoqua ainsi le drame de Torino survenu au retour d'une rencontre amicale au Racing de Bruxelles devant 40.000 personnes. De mon côté j'évoquai une photo du SOIR d'un des premiers matches internationaux de Paul, en 1957 contre la Roumanie au Heysel (1-0 pour la petite histoire), où l'on voyait Denis Houf (stratège également légendaire du Standard) reprenant en détente verticale le ballon avec Paul derrière lui, en disant qu'à cette époque la classe des joueurs primait sur les considérations tactiques et que plus aucun entraîneur actuel ne les aurait sans doute alignés ensemble. Paul précisa que c'était lui qui avait transmis le ballon à Denis. Il se souvenait parfaitement de la scène et ajouta que s'il ne se souvenait plus de tous ses matches il conservait encore un souvenir très vif de son premier en équipe fanion de l'Union à 19 ans ! Frédéric, lui, nous dit qu'il avait reparcouru sa collection de MIROIRS DU FOOTBALL avant de venir pour y retrouver l'interview d'époque de Paul, avec photo guitare à la main, réalisée par Roger De Somer, le correspondant belge de la revue qui était le chef de la rédaction football de LA DERNIERE HEURE. C'était l'époque où cet excellent mensuel français (hélas disparu) était amoureux du football belge que Pierre Sinibaldi avait révolutionné en introduisant, le premier en Europe (et dans le monde), la défense en ligne à Anderlecht. Et les anciens de regretter cette période où les journalistes sportifs étaient dignes de ce nom, comme Roger De Somer, Jacques Lecocq aux SPORTS et aussi Jacques Thibaut au SOIR. Didier Payen et son épouse nous avaient rejoints en cours de route et cette rencontre d'une heure passa à la vitesse de l'éclair. Seule ombre au tableau, la blessure encourue à l'entraînement l'avant-veille par Roger et qui l'éloignera des terrains pendant six semaines et, espère-t-on en se croisant les doigts, pas plus. Il souhaitait ardemment que l'on prenne des photos des trois générations de joueurs de l'Union que représentaient Jacques Bastin, Paul et lui. On se rendit donc aux Tréteaux où on retrouva le dernier survivant de la légendaire équipe aux soixante matches de championnat consécutifs sans défaite (record en principe inégalé en Europe, sous réserve de vérification des tripotages de la famille Ceaucescu) et ce fut un déluge de flashes de toutes technologies, Roger conviant même les Cyber-Unionistes à se joindre à eux. Paul et Roger avaient déjà vu la pièce et on se quitta, ravis de cette rencontre. Puis on gagna nos fauteuils en appréciant les installations, dans un style moderne, de la salle pas si petite que nous la décrivait Jacques Bastin dans sa lettre d'introduction au nom de L'Ordre du Bloempanch. Qui ne connaît BOSSEMANS ET COPPENOLLE, la pièce de Paul Vanstalle aussi légendaire que l'Union et le Daring dont elle retrace la rivalité dans les années trente via une romance à la Roméo et Juliette ? Des générations de comédiens bruxellois l'ont jouée. Pour ma part je la vis avec Jacques Lippe et Marcel Roels. Gaston Schoukens la porta à l'écran en 1938 avec l'également légendaire (il n'y a que des légendes dans cette histoire) Gustave Libeau et déjà Marcel Roels (informations en provenance de LE CINEMA BELGE édité tout récemment chez Flammarion par la Cinémathèque Royale de Belgique, une mine d'informations pour les amateurs; profitez-en, la Fnac le vend en promotion pour les fêtes; fin de la pub). Le film comprend des séquences d'actualités tournées lors d'un Union-Daring de l'époque. Après sa carrière footballistique Jacques Bastin se reconvertit dans l'écriture de revues de music-hall et en écrivit près de 500 ! Il y a quelques années l'idée lui vint d'écrire une suite actualisée à la pièce avec Myriam Vanstalle, la fille de l'auteur. On y retrouve les deux compères devenus grands-pères d'un petit-fils jouant dans l'équipe de Zottekattegem et que l'on dit convoité par Constant Van de Soubock, le puissant président d'Anderlecht. Ce thème se double d'intrigues parallèles avec un producteur hollywoodien, une actrice, la fille du président etc... Au total la pièce comporte douze personnages dont les trajectoires s'entrelacent avant de connaître une fin bien entendu heureuse. Une pièce écrite par un Unioniste habitant boulevard Machtens peut difficilement se terminer en drame, n'est-ce pas ? Elle est bien sûr d'un esprit bon enfant et s'adresse à l'évidence à un public de convaincus. Ce n'est pas une raison pour bouder son plaisir d'autant qu'on reste suspendu aux lèvres de Madame Chapeau en attendant qu'elle parle des "crapuleux de sa strotje", ce qu'elle finit par faire. Martine Maqua joue le rôle et est entourée de jeunes partenaires éminemment photogéniques (ce qui ne gâte rien) de la troupe des Compagnies Lasnoises. En outre un changement de décor durant le premier acte est ponctué de chants d'un accordéoniste jouant les airs que vous devinez. Bossemans venant en premier dans le titre, il commença par "C'est l'Union qui sourit" joyeusement reprise en coeur par une bonne partie du public. Il enchaîna bien sûr par "Wijle zijn van Meulebeke" qui rencontra un accueil glacial. Le dernier Daringman authentique serait-il mort ? J'incitai vivement le lendemain l'oncle de Michel et Laurent à réagir. C'était en tout cas révélateur de la réaction des publics selon que son équipe favorite est restée entière ou a fusionné avec d'autres concurrents mal en point. Un entr'acte arriva à point nommé pour les gosiers des chanteurs. Le spectacle dura jusque 23 h et Frédéric (à qui j'expliquai au passage ce qu'était la KB Lux) avait l'estomac dans les talons. Il y a peu de tables ouvertes dans la vie nocturne genevoise et il commençait à craindre de ne jamais voir les moules de ses rêves. On le rassura en l'emmenant au Loup Voyant près du cimetière d'Ixelles où on se retrouva à douze affamés également répartis entre générations, Guy Thelen et son épouse s'étant tout naturellement joints aux Cyber-Unionistes. Il fallut un certain temps pour se retrouver, ceux ayant choisi de venir par l'avenue de la couronne ayant dû faire la file pour souffler dans le ballon. L'avenue Louise fut nettement plus roulante. On continua à parler football avec passion, Mr. Christiaens, Guy, Frédéric et moi. Guy en rajouta même sur le sujet Mouscron et nous agrémenta de son expérience footballistique ("Une équipe qui s'entend, c'est dix points de plus à la fin de la saison."). Frédéric eut enfin ses moules et on se rassasia copieusement (votre serviteur à la choucroute) sauf Michel, l'estomac noué par l'évènement. Dehors il neigeait mais on n'en avait cure. Personne, apparemment, ne devait aller chercher ses "pistolets" au petit matin et votre serviteur se retrouva au lit à 3 h. Et on clôtura ce cyber-week-end le lendemain par le match Union-Torhout qui fera l'objet d'un compte rendu séparé, tous mes lecteurs(trices) n'étant pas vraiment fanas des incidences de la phase de jeu de la 27ème minute sur celle de la 66ème, des danses intempestives du drapeau par les juges de touche ou des dioptries des arbitres. Disons simplement qu'en l'absence de leur capitaine-musicien les Unionistes terminèrent l'année sur une fausse note. Le temps étant inquiétant une partie des Cyber-Unionistes regarda la première mi-temps en tribune. Le ciel semblant s'éclaircir, on alla sous l'influence démocratisante de Frédéric regarder la seconde depuis les gradins à ciel ouvert. Il put ainsi faire la connaissance du père de Michel et Laurent, et évoquer avec lui cette autre légende (encore !) du sport belge que fut le Royal IV. Il se remit alors à neiger. Le légendaire (toujours !) dernier quart d'heure de l'Union se termina sous un déluge et au coup de sifflet final on se rua transis vers la buvette pour la troisième mi-temps. Michel remit à Frédéric une carte jaune et bleue signée par tous les participants à ce week-end en l'honneur de son anniversaire qui avait eu lieu dans la semaine et je fus parmi les lâcheurs qui lui souhaitèrent un bon retour et rentrèrent se réchauffer chez eux. Qu'à cela ne tienne, Frédéric, tu seras toujours le bienvenu et on t'attend pour l'Euro. Et pourquoi pas avant ? Une équipe télé, ça vient faire des repérages. Bons réveillons donc et pour l'an 2000 je t'offre cette charade que tes connaissances te feront trouver à la vitesse de l'éclair : Mon premier est un habitant d'une ville suisse Mon deuxième est un temple extrême-oriental où il ne fait pas chaud Mon troisième est un plat Mon tout est une phrase que l'on peut dire partout à Bruxelles sauf à la Place Royale. |