Comme mille soleils brillaient au dehors et que le vent chantait, je me promenais sur les plaines fumantes. Nouveau printemps et nuages roses. Des pétales volaient dans les cieux de la renaissance. Des fleurs dansaient et pédoncules courbés. Du pollen s'effrite; attention aux rhinites. J'ai oublié mes antihistaminiques. En apnée, je descends… Puis couché, dans l'herbe… Des coccinelles mauves se battent. Et une araignée tricote. Sans doutes un chandail, ou peut-être des bottes. Mais qu'importe. Un furet s'enfuit et vingt biches clignent de l'oeil. Sûrement le pollen: poussière ensemançée et des bourdons planent. La piste n'est pas loin, mais l'aterrisage est dur. Ici c'est Saïgon et il pleut de lumière.
J'étais couhé sur le dos; un dièse; un demi-ton. Douce mélodie. L'herbe me chatouille les oreilles. Et les nuages filent… Peignant le ciel d'éléphants roses, mais ni moroses. Puis d'autres animaux et un immense Noé et sa barbe lunaire. Encore un ours, puis un oursin, ensuite un serpentin. C'est un carnaval céleste. Là-bas haut, ce n'est pas si loin. Ici bas, ce n'est pas si bas…
Soudain un choc sur mon nez tordu. Que vois-je? C'est louche et je louche, mais il y a un papillon posé sur mon nez. De vastes ailes sans fin, multicolores et même or, et des antennes paraboliques en forme de paratonerre. Les ondes passent et il me parle doucement et grinçant: -Bonjour Peter! Il est gentil et je lui rend sa salutation: -Bonjour Papillon… Il continue: - Je ne suis pas un simple papillon. Tu sais, on m'apelle Papillon Boxeur!… Hier, j'ai mis KO vingt kangourous! Je suis un champion de boxe! Alors je reprend:-Bonjour Papillon Boxeur!
-Bonjour Peter! Tu me rapelle un ami mouche qui s'apellait Jean-Jean Fly. Alors je t'apelle Peter Fly.
-Si tu veux, mais mon nom c'est Peter Valium.
-Oui je sais, mais… Oh tu entend?
-Quoi?
-Ce chant lointin… Ce sont des sirènes tristes!
-Papillon Boxeur, ce n'est pas possible! Tu sais bien que les sirènes vivent à la mer!
-Peter Fly, je te dis que ce sont des sirènes tristes!
-Les sirènes vivent dans l'eau…
-C'est sûr, mais dans le sol, il y a de l'eau. Et ces sirènes sont enfermées sous terre; voilà pourquoi elles sont si tristes. Elles voudraient tant faire briller leurs écailles à la lumière du jour.
Pour moi, ce qui était sûr, c'est que ce n'était pas des sirènes. Peut-être des asticots mélancoliques, ou des lombrics chanteur. Une diva taupe? Dailleurs, les sirènes ne chante pas ainsi. Valse sous-terraine sous des airs d'opéra triste. Un peu de terreau frais pour ces dames fânées. Théâtre de velours et cierge pascal. Arbre de noël qui vole en éclats.
Finalement, Papillon Boxeur et moi ne tombons pas d'accord. Corps à corps et rixe à mort. Il sort ses armes: six gants de boxe rouges et rutilants. Six coups de poingts rouges et méchants. Un pour le nez tordu, un autre crochut, un crochet à gauche, un autre pour la narine droite, un gauche à gauchen puis un droit dans les dents… Enfin Paf et Ko: un sextuplé vacarmeux; six coups de tonerres… C'est la chute d'un empire et le réveil fût dur.
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