A quoi faut-il finalement renoncer ? A l'attachement aux plaisirs des sens ou aux plaisirs eux-mêmes ?voir le texte complet de la question
Réponse :Texte complet de la questionTout d'abord "il faut", "il ne faut pas" n'appartiennent pas au vocabulaire bouddhique. Il n'y a aucune obligation. C'est à vous de voir en fonction de la nécessité que vous découvrez à la lumière de telle ou telle expérience, s'il est plus opportun d'aller dans une direction ou dans une autre. Si c'est la voie bouddhique que vous choisissez, le bouddhisme vous fournira simplement une méthode, mais jamais une idéologie, jamais un corpus de contraintes et d'interdits.
Vous dites que vous trouvez que cet article provoque pour vous une certaine confusion. Dans le bouddhisme, il n'y a pas de compréhension intellectuelle des phénomènes, mais uniquement une expérimentation des phénomènes. Les exemples que vous donnez d'une manière un peu désinvolte ("cela m'étonnerait qu'un moine bouddhiste par exemple soit indifférent à un magnifique coucher de soleil qui s'offre à lui, ni à l'harmonie qu'il se dégage d'une musique") me paraît poser justement la question de la subjectivité totale de ce qui est susceptible de toucher tel ou tel, de la raison pour laquelle tel ou tel souhaite se laisser toucher par un spectacle donné, de la manière dont tel ou tel cultive ou ne cultive pas ce sentiment largement égotique en lui-même. J'espère que vous admettez cette subjectivité et cette relativité absolue de tout sentiment esthétique (sur lequel la psychologie et la philosophie contemporaine ont d'ailleurs beaucoup travaillé).
Je vous dirai aussi que la démarche d'un bonze bouddhiste ne consiste pas à s'émerveiller de ceci ou de cela, dans la mesure où il a bien conscience du caractère éphémère et illusoire de tous les phénomènes et que ses attentes se trouvent véritablement ailleurs. Je vous dirai que conscient de cela, pour lui tout est susceptible d'être source d'émerveillement et non pas je ne sais quel découpage de je ne sais quel "moment privilégié " qui supposerait une discrimination arbitraire entre ce qui serait digne d'émerveillement et ce qui serait indigne. Je ne sais pas jusqu'où votre démarche vous a conduit, mais dans le bouddhisme vous ne trouverez pas de telles logiques discriminatoires entre "beau" et "laid", entre "éligible" ou "inéligible", dans le bouddhisme il n'y a pas dualité et tiers exclus, il n'y a pas discrimination.
Il me semble que si l'article auquel vous faites référence ("sur la question du renoncement ") a provoqué une certaine confusion, c'est plutôt une bonne chose. Il me semble en effet qu'il y a des concepts qu'il n'est pas toujours évident d'appréhender. Quoi ?, on pourrait conserver une relation intacte aux plaisirs des sens, sans les nier ? Eh bien oui ! Si vous lisez attentivement vous voyez que j'indique que le plaisir des sens est susceptible de "tomber comme un fruit trop mur", de s'éteindre de lui-même en quelque sorte, mais il n'est pas écrit qu'il disparaît, qu'il n'existe plus, que les sens n'exercent plus leur activité.
Il n'est pas possible de parler de l'attachement au plaisir des sens sans parler du plaisir des sens par eux-mêmes. Cet article était surtout une réaction ou une réflexion pour moi-même par rapport à cette problématique. Il me semble en effet qu'une affirmation tendant à nier purement et simplement le plaisir des sens et à considérer tout discours propre du corps comme un problème est absurde et conduit aux extrémités d'autres courants de pensée aussi funestes que dangereuses. Il me semble au contraire que ce discours admirable du corps à travers les sens, à travers la sensualité que chacun est en mesure de développer pour mettre en harmonie ses sens, le monde intérieur et le monde extérieur, ne peut pas être nié, effacé, ni combattu. A mon avis, ceux qui prétendent le contraire se trompent, trompent leur corps et leur pensée.
Pour vous donner une réponse plus nette, si cela est encore nécessaire, je vous dirai que c'est bien l'attachement au plaisir des sens qui est en cause, car c'est cet attachement qui donne aux sens une destination autre aux fonctions sensorielles qui permettent une simple préhension du monde, et c'est l'ego qui enfle, qui se construit et qui se renforce autour de cet attachement, autour de cette recherche perpétuelle et constante de plaisirs rattachés aux sens. La raison pour laquelle ce renoncement est recherché c'est que cet attachement est illusoire, que les sensations et les plaisirs qui s'en dégagent sont eux-mêmes éphémères, changeant, confus. Que par la même cette recherche des plaisirs des sens conduit aux déceptions, découragements, désespoirs, tristesse, bref à dukkha. C'est uniquement parce que cet attachement est une source certaine de souffrance que ce renoncement, cette mise à distance, est recherchée.
Est-il possible d'être plus clair ?
Il me semble bien que les raisons de cette démarche particulière à l'égard des sens (et à l'égard de tous les phénomènes) sont d'ailleurs largement décrites dans les textes bouddhiques. Que ce soit dans les cinq agrégats ou tout particulièrement dans le Satipatthana sutta (mais également dans de très nombreux autres textes) vous verrez qu'il est simplement question de décrire les phénomènes qui se déroulent dans notre corps, dans nos perceptions, dans nos sensations, dans notre pensée, sans y participer plus que de besoin et plus que de raison. Il s'agit d 'observer et de comprendre les mécanismes et les fonctionnements à l'uvre dans notre système psychique et psychologique. Il ne s'agit pas de nier, de combattre ou de supprimer ce qui serait absurde, vain et ignoble comme dit le bouddha historique dans les quatre nobles vérités.
Vous avez raison, il existe de réelles nuances ou divergences entre les auteurs. Quand j'ai écrit l'article "sur la question du renoncement ", je voulais réagir par rapport à différents ouvrages dont les auteurs déclaraient allègrement qu'ils n'avaient jamais vraiment connu de sentiments amoureux, ou d'attirance physique ou sensuelle et qu'ils restaient insensibles à ce qui généralement touche les gens. Ces auteurs ne me paraissant alors pas les mieux placés pour recommander aux autres de renoncer aux plaisirs des sens, dans la mesure où ils n'avaient pas eux-mêmes expérimenté ce processus.
J'espère avoir répondu à votre question.
Je suis étudiante et je m'interresse au bouddhisme, cependant beaucoup de choses restent flouent , notamment au sujet du renoncement (votre article m'ayant embrouillé plus qu'autre chose) . A quoi faut -il finalement renoncer ? A l'attachement des plaisirs des sens ou aux plaisirs eux même? je veux dire par là : cela m'étonnerait qu'un moine bouddhiste par exemple soit indifférent à un manifique coucher de soleil qui s'offre à lui, ni à l' harmponie qu'il se dégage d'une musique sacrée ! ! En fait la question du renoncement , selon ce que j'ai lu sur le bouddhisme, est toujours présentée de façons trés différentes et floues ! ! Parfois il est écrit ça , d'autre fois autre choses...Mais peut-être ai-je mal compris le sens de cet article et peut-être vous m'éclairer .
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