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33

Que feray-je, *Morel ? Dy moy, si tu l'entends,
Feray-je encor icy plus longue demeurance,
Ou si j'iray reveoir les campaignes de *France,
Quand les neiges fondront au soleil du printemps ?

Si je demeure icy, helas je perds mon temps
A me repaistre en vain d'une longue esperance,
Et si je veulx ailleurs fonder mon asseurance,
Je fraude mon labeur du loyer que j'attens.

Mais fault-il vivre ainsi d'une esperance vaine ?
Mais fault-il perdre ainsi bien trois ans de ma peine ?
Je ne bougeray donc. Non, non, je m'en iray.

Je demourray pourtant, si tu le me conseilles.
Helas (mon cher *Morel) dy moy que je feray,
Car je tiens, comme on dit, le loup par les oreilles.



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Comme le marinier que le cruel orage
A long temps agité dessus la haulte mer,
Aiant finablement à force de ramer
Garanty son vaisseau du danger du naufrage,

Regarde sur le port sans plus craindre la rage
Des vagues ny des vents, les ondes escumer :
Et quelqu'autre bien loing au danger d'abysmer
En vain tendre les mains vers le front du rivage :

Ainsi (mon cher *Morel) sur le port arresté
Tu regardes la mer, & vois en seureté
De mille tourbillons son onde renversee :

Tu la vois jusqu'au ciel s'eslever bien souvent,
Et vois ton *Dubellay à la mercy du vent
Assis au gouvemail dans une nef persee. 1