Production : Film Fernand Rivers. Productions Maurice Lehmann. - Distribution : Les Distributeurs Français
S.A.
Scénario original et dialogues : Sacha Guitry.
Réalisation : Sacha Guitry.
Collaboration à la réalisation : Fernand Rivers.
Chef opérateur : Jean Bachelet.
Décors : Joseph de Bretagne.
Musiques : Vincent Scotto.
Interprètes :
Jacqueline Delubac, Sacha Guitry, André Numés fils, Pauline Carton, Andrée Guise, Madeleine
Suffel, Simone Sandré, Lucienne Givry, Rivers Cadet, Robert Darthez, Paul Dullac, Charles Montel, Robert
Seller, Baldy, Louis Vonelly, Antoine, Régine Paris, Gustave Huberdeau.
Durée : 78 mn. Sortie : le 20 septembre 1935 au cinéma Colisée - Paris.
L'histoire :
Claude, un peintre fauché, et Marie, une jeune lingère, gagnent le premier prix de la loterie. Ce
sera le prétexte pour un long voyage "comme frère et soeur", dont ils reviendront amoureux.
Une comédie brillante aux allures de voyage de noces, avec Guitry extraordinairement sentimentale, léger
et séducteur...
Extraits des dialogues du film.
Quelques réflexions de l'auteur :
- Voulez-vous, monsieur, parler de vos idées sur le cinéma, en général ?
- J'ai tourné deux films... Ça ne compte plus... C'est fini.
- Vous êtes l'auteur des scénarios, j'imagine, l'acteur et le metteur en scène ?
- Je suis l'« auteur » du texte, du découpage, du montage...de tout... J'en excepte la musique.
- Comment avez-vous travaillé à tant de problèmes à la fois ?
- Eh bien, j'ai cru comprendre, avant de commencer à tourner, qu'il y avait une assez grande part d'aléa
dans la confection des films. J'ai voulu éviter cet aléa. J'ai voulu tout prévoir et apporter
au studio, en arrivant, un film découpé, non seulement découpé, mais monté.
- Un travail insensé ?..
- Il n'y a pas de travail insensé. Il y a le travail, toujours passionnant.
- Plus ou moins long ?
- Je ne sais pas ce que c'est de trouver le travail trop long.
- Vous avez écrit ?...
- Tout: les jeux de scène, même les raccords, même les gestes qu'on fait à tel ou tel moment.
- Vous les avez imaginés d'abord ?
- Je les ai vus sur l'écran d'abord. Puis je me suis transformé en spectateur et j'ai apporté
le film tout découpé, tout prêt.
- Et la mise en scène ?
- Je l'ai préparée, naturellement. La mise en scène est un terme qui m'exaspère toujours.
- C'est la seule manière que nous ayons de qualifier l'ensemble du jeu des acteurs.
- Je ne peux pas comprendre un auteur qui ne met pas sa pièce en scène. (...) Je ne pourrais
admettre qu'un autre que moi s'en occupât une seconde.
- Le cinéma, pour vous, est-il différent du théâtre ?
- Je l'ai trouvé très différent quand le film a été fini. Je continue à attendre une répétition
générale qui n'aura jamais lieu. Nous avons répété. Nous avons donné des répétitions mises au
point autant que cela pouvait être et alors on nous a dit "C'est fini.". C'est exactement comme
si à la veille d'une répétition générale, on me disait: "On ne passe pas, la pièce ne va pas être jouée".
- Et quand vous avez vu le film ?
- (...) J'avais acquis pendant Pasteur une petite expérience.
Je sentais, je voyais déjà bien de choses. Evidemment Pasteur est un film absolument à part,
si l'on entend par film une manifestation de joliesse. Les discussions sur les microbes, la génération
spontanée ne peuvent justifier des manifestations de beauté - d'une certaine beauté - tandis
que Bonne chance...
- Film gai ?..
- Le mot gai, c'est un désir qu'on exprime. J'ai voulu faire un film gai. Je serais navré qu'on rît
à Pasteur et pleurât à Bonne Chance.
- Ccomment vous êtes-vous décidé à venir au cinéma ?
- Eh bien! Après avoir dit bien de fois : « Non, non, non » aux demandes qui m'étaient
faites, tout à coup, j'ai répondu «oui».
- Pourquoi ?
- J'en ai eu envie ce jour-là...Et, dès cette seconde j'ai eu hâte de commencer.
- Pensez-vous que certaines de vos oeuvres pourraient être réalisées au cinéma?
- Je crois que ce serait actuellement un peu enfantin de définir la destinée du cinéma. Nous
n'en savons rien. L'opinion des gens qui décrètent tout d'avance importe peu. Il faut d'abord prouver.
Après on peut dire: «Voilà ce que j'ai voulu faire». En art, la preuve est généralement
donnée par un homme qui n'a rien voulu prouver. On ne fait souvent, du reste, quelque chose d'original que
lorsque l'on croit copier quelqu'un.
- Pourquoi ?
- Je crois à la chaîne qui relie au passé. Il faut avoir de ascendants intellectuels. Se laisser
influencer par le passé c'est le seul moyen d'aller en avant.
26 juin 1935 à M.H.Berger, Excelsior.