Les récits d'un chevalier errant...
Ivan; la Dryade

Lors d'une marche sordide au beau milieu d'un torrent glacial, un homme s'approcha de moi. " Si la Terre est plate, alors le Soleil glisserait au-dessus de nos têtes et ne tournerait pas... " Je le dévisageai, ne comprenant pas trop où il voulait en venir. Il semblait grand, avec une robe blanche tachée sur le dos. Jeune druide il était, et semblait bien sage. Mais un drôle de nom il avait : Ivan Fiodorovitch Karamazov. Alors Ivan tout court faisait l'affaire, avec le sourire. Nous longions des côtes abruptes, escarpées par l'âge et le souffle du vent. Il m'enseigna bien des choses sur les plantes, les caprices de la nature. Oui, sage il l'était. Et certainement philosophe. Nous parcourûmes bien du chemin ensemble, assez pour devenir bons amis. Un bon jour, un bruit d'une grande fureur nous lécha les oreilles. " La chute... " laissa échapper Ivan, les yeux ronds.
-" Mais qu'est-ce qui se passe ? Qu'a-t-elle de particulier cette chute ? Elle semble bien normale...
-Les chutes Yneromt Conm sont l'épreuve finale des druides de chemin. Ce que je suis. Me voici rendu.
-Et que dois-tu y faire ?
-Que devons-NOUS y faire tu veux dire... " Ses yeux avaient changé. Ils brillaient d'un drôle de feu. Le 'nous' ne me plaisait guère.
-" Pourquoi 'nous' ? C'est toi le druide, pas moi... et ...
-Je redoutais que ça arrive. Le compagnon de voyage doit accompagner jusqu'au bout le druide. Et en plus que tu connais tout mon savoir, si tu réussis la Chute tu seras druide...
-Mais chevalier je suis ! ! Non pas druide... et... ahhh tant pis allons-y... "
Voilà comment se termina notre échange.

Des marches longeaient la côte en direction de la chute d'eau.
-" Combien y ont réussi ? ? Avec un sourire, il me répondit :
-Vraiment pas beaucoup... "
À son air, on aurait dit que l'échec était imminent. Nous montâmes quand même assez vite. La chute était d'une puissance phénoménale. L'eau nous éclaboussait, non pas de petites larmes rafraîchissantes mais bien de torrentueux coups à faire rouler une forêt de rochers. Nous cramponnant ici et là, il finit par crier :
-" Le but est de ne pas mourir... " et à ces mots je le vis s'envoler. Je le rattrapai juste à temps et l'accrochai au morceau de roche qui me retenait.
-" Je dois me rendre à l'arrière... Un passage s'y trouve... " Une deuxième bourrasque encore plus puissante que ce que nous subissions venait de nous happer. Il me retint en vint. Je n'eut le temps seulement de lui crier " Tu y arriveras... " et j'étais parti dans la rivière.

Une douce vague me ramena sur la rive. Me prenant sur son sable chaud, je recrachai l'eau un peu saline qui s'était infiltré dans mes poumons. À quatre pattes, dans le sable, je souriais. Mais un curieux pressentiment, celui que mon instinct m'a toujours soufflé au danger, me disait de ne pas bouger et de laisser aller. Une main me prit l'épaule; je me retournai sec en regardant la personne qui était derrière moi. C'était une dryade, une nymphe des bois et des forêts... Je ne pouvais plus bouger. Ses longs cheveux de soleil, bouclés, lui cachaient le visage. Elle prit peur: "Non attends!! Je ne te ferai aucun mal..." Mais il était trop tard, elle disparut comme une plume dans la brise.


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