Les récits d'un chevalier errant...
Xhir de Tys et Polfinge
Je ne savais pas où 'magiquement' on m'avait transporté. Tout ce
que mes yeux distinguaient était l'horizon. Mais rien ne sert de vouloir savoir
si l'on ne bouge pas. Je dus marcher des jours, me nourrissant de quelques fruits
sauvages et de quelques petits gibiers assez rares quand j'arrivai à la limite
des royaumes inhabités et inhabitables. Cette terre dont mon père m'avait tant
parlé: Poaeilsifii ou Polfinge tenant son origine d'une langue morte
depuis longtemps, s'affichait devant moi. Cette région inhospitalière cachait
un désert parsemé de ronces, de pierres noires et de sable gris. Mon père me racontait
que rare étaient ceux qui s'y étaient rendus pour de toute façon en repartir déçus,
car il n'y avait rien à conquérir; ni richesse à exploiter, ni terre à cultiver
ni population à asservir. Personne ne savait ce qu'il y avait après ce désert.
On a toujours cru que ce lieu était en possession du Démon et qu'il trônait par
delà cet océan de sable. Mais dans ces terres recluses vivait un ermite oublié.
Xhir de Tys fut le nom qu'on lui attribuait. Il n'était pas sorcier, encore moins
druide. Mais qui était-il vraiment? Toutes ces pensées s'entrechoquaient dans
ma tête, souvenir des histoires que mon père aimait me raconter. J'allais être
le premier depuis des siècles à le voir car je pris la décision de le retrouver.
On le disait immortel...
Plus je m'enfonçais dans cet enfer, plus les ronces déchiraient
ma peau, plus le sable brûlait mes pieds. Les nuits étaient glaciales. Le vent
impardonnable. S'il vivait encore, c'était à se demander comment il y arrivait.
L'espoir, comme l'eau, vint à manquer. Mais lors de la seule journée pluvieuse
(une averse de trente secondes...) qu'il y ait eu sur ces lieux, je pus distinguer
des pas. Des traces de quelques jours à peine. Je les suivis, avec un nouvel
espoir pour arriver à une grotte dissimulée sous une dune. Un homme s'était
écroulé à sa porte. Je le transporta à l'intérieur. Il y faisait frais et on
pouvait entendre le murmure de l'eau. J'en trouvai facilement et offris à boire
à cet inconnu. Il revint à lui peu à peu. Me fixant chaleureusement, il fit
un certain sourire et me fit signe de la tête, un merci silencieux. Son regard
contenait les affres de milliers d'années. Il était grand, les cheveux ébouriffés,
une barbe de sagesse. L'homme semblait ne pas avoir d'âge. ...il influence les coeurs jeunes ou vieux Il continua... Il m'apprit l'histoire et la géographie des royaumes actuels,
la philosophie telle qu'il la voyait, telle qu'il voyait le temps passer. Il
en savait bien plus qu'il voulait l'imaginer. Durant mon séjour, je pus accomplir
un miracle; je réussis à le faire sourire et même rire. Il était bon, généreux,
calme et patient. J'en fis mon maître spirituel. Après quelques pleines lunes,
l'obligation de partir se faisait sentir. Sur l'heure du départ, déjà Xhyr au
loin, je m'aperçus que je ne lui avais jamais dis mon nom. Et une voix s'éleva
derrière moi:
"Que fais-tu dans ces parages? furent ces premiers mots.
-Je cherche Xhyr... Il éclate de rire.
-Pourquoi? Que lui veux-tu?
-Mon père m'a déjà parlé de lui comme un homme ayant des Dons incroyables. J'aimerais
apprendre de lui.
-Apprendre quoi? Je suis Xhir. Xhir l'ermite. Collaborateur de Rodrigue le Restaurateur,
qui imposa le premier règne d'un réel souverain sur ces terres barbares. Ce
fut dur labeur de faire naître ce qu'on nomme civilisation, ici, dans ce désert
même..."
Je fermai les yeux. Sa voix dessinait dans mon âme toutes les images de son
souvenir. Son premier Don sûrement. Je me souvenais des vers de mon père:
Il avait sauvé plusieurs rois du drame {...}
Ses paroles apaisent, ramènent le calme
Eteignent facilement tous ces feux que la colère aveugle enflamme.
"Le vieux Roi avait une telle confiance en moi qu'il me donna même la main et
la destinée de sa tendre fille Ines. Je l'aimais comme elle m'aimait, comme
l'amour aime la vie. Elle nous donna un fils, beau et farouche comme le vent.
Une douce romance tomba sur nous deux. Mais quelques années plus tard tombait
aussi l'Ananké même, la Fatalité. Mon fils unique disparut et ma dulcinée fut
décapitée sous mes yeux..." En disant ces mots, des larmes de souffrance griffaient
ses joues. "En vain, j'ai cherché mes descendants. Des siècles. Des siècles!!!"
Sa voix éclata dans la grotte, il exorcisait enfin la rage qui meurtrissait
son coeur. "Des siècles à errer. Oui, j'ai un don, celui de ralentir ma vieillesse.
Mais je ne suis pas immortel à ce point. Si par mégarde je me blesse, le sang
fera rougir les nuages et si mon coeur se transperce ce sera pour moi la fin.
J'ai joué dans ce désert étant petit, alors qu'il était tout fleuri. J'ai servi
maints et maints empereurs, toujours les voyant vieillisant, me laissant, dépourvu,
à la merci du bon vouloir du monarque suivant. Mais il n'y a plus de roi depuis
que la pluie ne tombe plus. Que voudrais-tu apprendre de moi? La malédiction?
Comment souffrir loin de tout???
-Non. Votre incroyable sagesse. Je ne veux que partager vos souvenirs et savoirs..."
Il me fixa à nouveau. Depuis longtemps, trop, il rêvait que quelqu'un arrive
et lui dise ces paroles. Il me présenta sa main que je serrai.
"Soit. Je t'enseignerai ce que je sais."
"Dis un grand bonjour à ton père Drax le Guerrier à qui je dois la vie un de
ces jours et ne t'inquiète pas, tu le trouveras ce dragon blanc..." Avec un
sourire des plus énigmatique, il disparut.
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