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Ne lira-lon jamais, que ce Dieu rigoureux ?
Jamais ne lira-lon que ceste Idaliene ?
Ne voira-lon jamais *Mars sans la Cypriene ?
Jamais ne voira-lon, que *Ronsard amoureux ?
Retistra-lon tousjours, d'un tour laborieux
Ceste toile, argument d'une si longue peine ?
Revoira-lon tousjours *Oreste sur la scene,
Sera tousjours *Roland. par amour furieux ?
Ton *Francus, ce pendant, a beau haulser les voiles,
Dresser le gouvernail, espier les estoiles,
Pour aller où il deust estre ancré desormais
:
Il a le vent à gré, il est en equippage,
Il est encor pourtant sur le Troien rivage,
Aussi croy-je (*Ronsard) quil n'en partit jamais.
Qu'heureux tu es (*Baif) heureux & plus qu'heureux,
De ne suivre abusé ceste aveugle Deesse,
Qui d'un tour inconstant & nous haulse & nous
baisse,
Mais cest aveugle enfant qui nous fait amoureux !
Tu n'esprouves (*Baif) d'un maistre rigoureux
Le severe sourcy : mais la doulce rudesse
D'une belle, courtoise, & gentile maistresse,
Qui fait languir ton coeur doulcement langoureux.
Moy chetif ce pendant loing des yeux de mon Prince,
Je vieillis malheureux en estrange province,
Fuyant la pauvreté : mais las ne fuyant pas
Les regrets, les ennuys, le travail, & la peine,
Le tardif repentir d'une esperance vaine,
Et l'importun souci, qui me suit pas à pas.