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65

Tu ne crains la fureur de ma plume animee,
Pensant que je n'ay rien à dire contre toy,
Sinon ce que ta rage a vomy contre moy,
Grinssant. comme un mastin la dent envenimee.

Tu crois que je n'en sçay que par la renommee,
Et que quand j'auray dict que tu n'as point de foy,
Que tu es affronteur, que tu es traistre au Roy,
Que j'auray contre toy ma force consommee.

Tu penses que je n'ay rien dequoy me vanger,
Sinon que tu n'es fait que pour boire & manger:
Mais j'ay bien quelque chose encores plus mordante,

Et quoy ? l'amour d'*Orphee ? & que tu ne sceus oncq
Que c'est de croire en Dieu ? Non. Quel vice est-ce doncq ?
C'est, pour le faire court, que tu es un pedante.


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Ne t'esmerveille point que chacun il mesprise,
Qu'il dedaigne un chacun, qu'il n'estime que soy,
Qu'aux ouvrages d'autruy il veuille donner loy,
Et comme un *Aristarq' luymesme s'auctorise.

*Paschal, c'est un pedant' : & quoy qu'il se desguise,
Sera tousjours pedant'. Un pedant' & un roy
Ne te semblent-ilz pas avoir je ne sçay quoy
De semblable, & que l'un à l'autre symbolise ?

Les subjects du pedant' ce sont ses escoliers,
Ses classes ses estatz, ses regents officiers,
Son college (*Paschal) est comme sa province.

Et c'est pourquoy jadis le *Syracusien
Aiant perdu le nom de roy Sicilien,
Voulut estre pedant', ne pouvant estre prince. 1