Extrait de Instincto Magazine n° 35, novembre-décembre 1990, Editorial par G.-C. Burger
Le nuage de probabilité s'approche : à en croire les bruits de couloir, un nonlieu devrait être prononcé prochainement par le Parquet dans l'affaire qui me concerne.
Après deux ans d'instruction, d'enquêtes, d'auditions, de dépositions, de passage au crible de tous les documents saisis lors de la grande perquisition du 8 septembre 1988 engageant vingt policiers, le Substitut du Procureur ne peut que constater l'absence de tout fait justifiant la procédure dont j'ai été l'objet. Il s'avère que mon activité n'entre pas dans le cadre d'un exercice illégal de la médecine.
Aucun texte ni aucun enregistrement de conférence ne constituent une publicité irrégulière pour une thérapie. Quant à l'escroquerie, la brigade financière de Versailles, après deux ans d'épluchage, a fini par reconnaître l'absence de toute irrégularité dans les comptes et l'absence de toute victime. Ainsi les trois chefs d'inculpation qui planaient audessus de ma tête s'avèrent nuls et non avenus.
Formidable, la Justice : on détruit la réputation de quelqu'un, on l'empèche de parler de ce qui est le but de sa vie, on le jette en prison parce qu'il participe à une émission de télévision, on lui interdit de retourner dans son appartement, on l'oblige à verser une caution pour engloutir ses dernières économies, on le met hors d'état de gagner sa vie et de poursuivre ses recherches, tout cela pendant un temps suffisant pour qu'il en sorte ruiné, et quand on s'aperçoit qu'on s'est trompé, on le renvoie tout tranquillement reprendre la vie active sans un mot d'excuse.
Je pourrais demander un dédommagement ? Là aussi, la procédure fait bien les choses. La demande doit être présentée à une commission, composée de trois magistrats, qui statue souverainement sur l'obole à verser au lésé, et dont la décision ne peut être l'objet d'aucun recours. A la fois juge et partie... ne nous faisons donc pas trop d'illusions !
Il y a vraiment quelque chose qui mérite dêtre repensé dans le fonctionnement de la justice. Le dogme de l'inculpé présumé innocent ne sert qu'à se donner bonne conscience. C'est le paravent derrière lequel s'abritent des méthodes répressives plus que discutables, mais il ne faut pas se leurrer. Celui qu'un juge inculpe est automatiquement ressenti comme coupable par ses proches, par ses relations professionnelles, par le public en général s'il est connu. Pour peu que son affaire ait un relent de scandale, il sert encore de pâture aux médias, toujours pressés de vendre du papier. Dès cet instant, plus personne ne peut lui porter secours, aucune personnalité influente, aucun joumaliste, même parmi ceux qui sont convaincus de son innocence. Car, si quelque fait répréhensible sortait en tribunal, ceux qui auraient pris parti pour l'inculpé se feraient salir avec lui. C'est le mÍme phénomène qui conduisait l'hérétique au bûcher du temps de l'inquisition. Il suffisait qu'un accusateur quelconque prétende avoir vu le démon dans ses yeux. Tous ceux qui auraient voulu le défendre risquaient tout au plus de brûler avec lui. Donc chacun était obligé de confirmer la présence du présumé démon, et finalement l'unanimité était faite quant à la culpabilité du possédé. Le Pape luimême, qui savait que Galilée avait raison, n'avait pu obtenir sa libération, il aurait compromis sa propre autorité.
Aujourd'hui, l'oubliette a été remplacée par la cellule, les bûches par le papier journal, les flammes par la rumeur qui excelle à brûler la réputation de l'excommunié. Les choses sont plus douces, mais le fond du processus est le même. Avec l'inconvénient de se voir amplifié par les moyens de communication modernes à une nation entière en un tournemain. Il est vrai que l'instinctothérapie, un an et demi après le Monde, l'Evènement du Jeudi et le bruit fait autour de l'intervention de la justice, est perçue par la majoritié du public comme un truc douteux. Mieux vaut ne pas trop y toucher, on ne sait jamais. L'attente d'un verdict qui tire les choses au clair s'est enlisée peu à peu dans une méfiance, voire une certitude qu'il s'agissait d'une charlatanerie, cela d'autant plus facilement que la démarche est difficile à saisir pour le commun des mortels. Le résultat, c'est que les structures laborieusement mises en place depuis plusieurs années, sont gravement menacées.
Un nonlieu a évidemment cela de fâcheux que rien ne viendra redresser la situation. Les mauvaises langues y verront tout au plus le résultat de quelque manigance ou d'un hypothétique soutien politique. II faudrait tout l'éclat d'un procès pour déchirer le tissu de mensonges dans lequel on cherche à étouffer notre démarche et inverser les images qui se sont implantées dans les esprits. Conclusion: il n'y a pas d'autre solution que d'agir par nousmêmes. Si nous attendons que la manne nous tombe du ciel, il ne se passera rien. Seule une action suffisamment percutante auprès du public pourra redresser la situation.
C'est pourquoi nous lançons un pressant appel à tous les membres de notre association. Vous tous qui avez témoigné de votre volonté de soutien lorsqu'on me jetait en prison, c'est maintenant que vous pouvez agir. C'est maintenant que vous devez agir. Et nous ne vous demandons pas le Pérou: il s'agit simplement de nous aider à organiser des soirées d'information, des conférences, ou des cours, chacun selon ses possibilités, aussi petites soientelles. C'est en réunissant les petits ruisseaux qu'on fait les grands fleuves.
Des conférences publiques, surtout, destinées àremettre les pendules à l'heure, par exemple sous le titre: "La vérité sur l'instinctothérapie". Nous avons déjà distribué au salon de Marjolaine des papillons portant ce titre, qui semblèrent remporter un vif succès au point que les organisateurs se sont empressés d'en interdire la distribution... La Guerre du cru n'est certainement pas terminée. Nous nous heurterons encore à bien des obstacles, car notre démarche dérange trop d'intérêts. Mais il est de notre devoir de la faire connaître.
En cette fin de siècle où la science se targue de progrès gigantesques, l'ignorance crasse qui recouvre le problème alimentaire mérite d'être dénoncée. Nous avons, pour le faire, le seul raisonnement fondamental qui jette un pont logique entre biologie, nutrition et pathologie. Nous sommes aussi les seuls à avoir pris conscience par notre propre expérience des erreurs de l'alimentation traditionnelle. Cet étrange monopole, qui met en jeu la santé de milliards d'individus, nous confie une lourde responsabilité. A nous d'y faire face !