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Comme nous l'avons déjà vu, j'ai effectué mon stage en responsabilité en seconde année de BTS Informatique Industrielle. Or, dans cette section, une partie importante du second semestre consiste pour les élèves au développement d'un projet à caractère industriel. Ce projet, et les documents connexes donneront lieu à deux revues de projet et à une soutenance finale intervenants avec un fort coefficient dans l'obtention du BTS.
Au cours du second semestre, c'est à dire après avoir mené l'expérience présentée dans les pages précédentes, j'ai suivi les projets. J'étais donc à la disposition des élèves pendant les heures dédiées au projet (de 8 à 16 heures par semaine) pour les aider à trouver des solutions aux problèmes qu'ils pouvaient rencontrer.
Si, dans un premier temps, mon assistance portait uniquement sur l'aspect purement technique (sans interventir ni au niveau méthodologique, ni au niveau de la gestion de projet), au début mars, lors de la première revue de projet, j'ai constaté qu'un certain nombre d'élèves étaient fortement en retard sur le développement de leur projet. En outre, dans leur méthode de développement, ces élèves semblaient s'être totalement déconnectés des besoins exprimés au niveau du cahier des charges.
Paradoxalement (?) ces élèves, travaillaient en redondance sur un même projet, le projet SysDo dont la portée technique était relativement limitée, comparée aux autres projets (pour résumer, il s'agit de mettre en oeuvre une liaison série sur PC en utilisant l'API Win32 afin de réaliser un banc de test pour des modules domotiques).
Au regard des problèmes décelés lors de la revue de projet, j'ai décidé, en accord avec le professeur coordinateur de la section, de prendre en charge les six élèves (trois binômes) travaillant sur ce projet. Ainsi, je leur ai régulièrement imposé des revues d'avancement pendant lesquelles, oralement, et à l'aide des supports de son choix (transparents, documents, ...), un élève de chaque binôme venait me présenter l'avancement du travail. Après cette présentation de 10 à 15 minutes, je posais des questions visant, non pas à évaluer stricto sensus le travail du binôme, mais à forcer les élèves à s'interroger sur les problèmes possibles liés à leur projet et/ou à la solution retenue. Ce système de questionnement oral individuel m'a également permis de mettre l'accent pour chaque élève sur les points techniques nécessitant de sa part un approfondissement afin d'être correctement préparé à l'oral du BTS.
Parallèlement à ce travail, j'ai également eu avec ces élèves, de façon collective, des revues de gestion de projet pendant lesquelles ils ont pu débattre entre-eux, sous ma supervision, des problèmes techniques rencontrés et/ou identifiés et des moyens de les résoudre. Ces réunions m'ont également permis de remettre les élèves sur les rails d'un développement selon le cycle en V.
Afin de tenter d'identifier les raisons du retard pris par ces élèves, j'ai repris la taxonomie développée lors de la présentation de l'expérience, mais appliquée cette fois-ci au niveau des élèves et non des binômes:
Binôme | Elève | Catégorie |
---|---|---|
BP1 | EL03 | - |
EL14 | - | |
BP2 | EL07 | - |
EL18 | 0 | |
BP3 | EL12 | 0 |
EL20 | - |
En première analyse, uniquement en consultant le tableau ci-dessus, on pourrait expliquer de façon relativement simpliste les difficultés éprouvées par ces élèves en disant que leur niveau est trop faible.
Cependant répondre ainsi reviendrait à négliger plusieurs points importants:
En utilisant l'outil d'estimation en besoin des élèves en présence professorale exposé en annexe A, on peut catégoriser chacun de ces binômes ainsi:
Binôme | Signature | Catégorie du binôme |
---|---|---|
BP1 | -- | A éviter |
BP2 | -0 | Acceptable |
BP3 | 0- | Acceptable |
Comme on peut le constater sur la tableau ci-dessus, ces trois binômes
font partie des catégories de binômes demandant le plus d'attention de la part du
professeur. Il était donc prévisible que ces binômes éprouvent
des difficultés.
Finalement, la question à se poser est double:
Des éléments de réponse à la double question évoquée ci-dessus sont venus lors
de conversations avec les élèves. En effet, il est assez vite apparu que
ceux-ci avaient ressenti comme une profonde dévalorisation d'eux
même (ce qui nous rammène à la
définition de la motivation) le fait que
les différents professeurs de la section aient catalogué
leur projet comme facile.
En outre, et par conséquent, les professeurs apportaient un soutient moins
important à ces élèves, puisqu'a priori ils auraient dû en avoir moins
besoin.
Or, c'est ignorer un point mis en évidence par le classement des élèves en différentes catégories résumé dans le tableau 5-1: les élèves qui participent au projet SysDo éprouvent habituellement des difficultés pour avancer en TP et donc, a fortiori en projet. Pourquoi? Nous l'avons vu dans la conclusion de l'expérience, une des raisons principales est qu'en absence d'encadrement valorisateur la concentration de ces élèves sur le travail restant à réaliser est perturbée par les doutes qu'ils ressentent quand au travail qu'ils ont déjà réalisé, voire par sa remise en chantier. Or, si cette attitude se traduit dans le cadre d'un TP par un retard quand à l'atteinte des objectifs, ses effets sont multipliés dans le cas d'un projet plus important, comme c'est le cas du projet de fin d'étude. Ce comportement se traduit alors par une paralysie pure et simple du projet après quelques semaines: il n'y a plus de progression, l'essentiel du temps étant passé à refaire encore et toujours ce qui a déjà été fait, l'élève espérant (vainement) ainsi obtenir une version de sa production dans laquelle il pourrait enfin avoir confiance.
Partant de ce constat, en soutenant les binômes réalisant le projet SysDo, et en dehors des différentes revues, j'ai insisté sur la valorisation du travail effectué par les élèves, sous la forme d'encouragements, comme en TP, mais également en leur montrant comment certains outils peuvent être utilisés pour valider un travail, et en particulier en les incitant à mettre en place une stratégie de test.
A l'heure où j'écris ces lignes (fin avril), pour respecter le planning prévu par l'équipe enseignante, les phases "programmation" (codage et déboggage, intégration) des projets devraient être terminées. C'est le cas pour les binômes BP1 et BP2. Le binôme BP3 quand à lui en est à la phase d'intégration, et a intégré environ 75% des fonctionnalités du logiciel. En tout état de cause, il se situe dans la moyenne haute d'aboutissement des projets de STS informatique industrielle au lycée Rascol à cette date.
En conclusion, comme on peut le remarquer au vu de l'exposé ci-dessus une présence judicieuse, c'est à dire sans ingérence (il ne s'agit pas de donner la solution, ou de déposséder les élèves de leur travail) du professeur a permis à ces élèves d'au moins combler le retard accumulé lors des deux premiers mois du projet. C'est à dire, en d'autres termes, que ces élèves, habituellement moins rapides que les autres, ont travaillé environ 1,5 fois plus vite que leurs camarades (dont certains, faut-il le rappeler, avaient été classés dans la catégorie +) dans la même période de temps, simplement parce qu'ils avaient pris confiance en eux.
Enfin, j'insisterai sur le fait que s'il est important de faire prendre confiance en eux aux élèves les plus faibles, il est également fondamental, à mon sens, de fournir à ces élèves en particulier, mais aussi à tous les élèves, des outils pour valider eux-même leur travail, afin de leur permettre d'atteindre la maturité nécessaire pour pouvoir juger eux même de la valeur de leur travail.
Mémoire professionnel, © 1999-2000 Sylvain LEROUX